Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail

    ©Ministères sociaux-Dicom-Emma Prosdocimi-Sipa

    En résumé
    • Les entreprises seront davantage outillées pour prévenir la désinsertion professionnelle.
    • Le ministre prône une approche globale de la prévention sur le chantier.
    • Article paru dans le magazine Prévention BTP n°256 de novembre 2021, pages 34-37.

    Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail, présente l'un des enjeux majeurs du futur Plan santé au travail : la prévention de la désinsertion professionnelle, avec les outils que la loi sur la santé au travail met à disposition des employeurs et des salariés. Il explique sa vision du rôle de la branche du BTP pour faire progresser encore la prévention dans le secteur.

    Le futur Plan santé au travail (PST 4) devrait être dévoilé en cette fin d'année. Quels enseignements avez-vous tiré du précédent plan ?

    Le PST3 a mis l'accent sur la prévention primaire, celle qui agit en amont de la maladie, sur les facteurs de risque. C'est essentiel et nous allons poursuivre dans cette voie qui a fait ses preuves. De nombreuses initiatives ont été menées et l'OPPBTP a été partie prenante d'actions phares. Que ce soit sur l'amiante avec le rapport « Carto Amiante », sur les chutes de hauteur, sur les troubles musculo-squelettiques et le déploiement d'outils numériques pour accompagner vos entreprises dans l'évaluation des risques et la réalisation de leur DU. Plus largement, les travaux menés par l'OPPBTP sur l'apport de la prévention à la performance globale des entreprises contribuent à faire progresser la prévention. Même s'il reste encore beaucoup de choses à faire, je salue l'investissement du secteur du BTP qui a su prendre à bras-le-corps le sujet de la santé au travail pour mieux prévenir les risques professionnels et réduire les accidents du travail. Les entreprises du BTP ont bien compris que la qualité de vie au travail et les conditions de travail sont des sujets qui finissent par être des éléments de choix pour les salariés, davantage encore lorsque certains métiers sont en tension.

    S'agissant du PST4, sans être exhaustif, pouvez-vous citer quelques grandes orientations qui auront un impact direct sur la prévention des risques dans les entreprises du BTP ?

    La prévention de la désinsertion professionnelle est un axe fort de la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, et le futur Plan santé au travail en est un des bras armés. Je préfère la formule « maintien dans l'emploi », mais l'objectif est le même : mettre en place des dispositifs avec les médecins du travail pour accompagner les salariés en situation de fragilité, risquant de devenir inaptes. Les nouveaux services de prévention et de santé au travail disposeront d'une cellule dédiée pour aider les entreprises à trouver une solution. De plus, la loi crée l'entretien de mi-carrière avec le médecin du travail qui permet de faire le point sur l'état de santé du salarié et le poste qu'il occupe. Les échéances de cette visite seront prévues par un accord de branche. La création du rendez-vous de liaison est également un outil intéressant pour mieux anticiper et préparer le retour du salarié au travail après une maladie de longue durée. Et nous savons qu'une petite entreprise avec un plaquiste ne va pas inventer un poste d'administratif si ce dernier ne peut plus exercer son activité. Nous prenons en compte cette réalité pour que l'employeur et le salarié, avec le service de prévention et de santé au travail, puissent réfléchir également aux options de réorientation professionnelle tout en renforçant des dispositifs tels que les conventions de rééducation professionnelle en entreprise ou encore les essais encadrés.

    La gouvernance des nouveaux services de prévention et de santé au travail est également revue…

    En effet, il s'agira pour la branche de trouver comment les dispositions de la loi s'articuleront avec son organisation actuelle pour favoriser l'accompagnement et le conseil en matière d'évaluation des risques et de prévention, en particulier auprès des TPE-PME, très nombreuses dans le secteur du bâtiment. Ce sera l'objet de discussions entre les partenaires sociaux.

    En lien avec le PST4, la branche est le lieu où on peut décider de grandes actions de prévention transverses, au bénéfice de toutes les entreprises, petites et grandes.

    Laurent Pietraszewski

    Visite de Laurent Pietraszewski sur le chantier d'un immeuble de bureaux à Strasbourg Visite de Laurent Pietraszewski sur le chantier d'un immeuble de bureaux à Strasbourg. ©DR

    Quelle est votre vision du rôle des branches professionnelles et particulièrement de celle du BTP dans notre système de santé au travail ?

    En lien avec le PST4, la branche est le lieu où de grandes actions de prévention transverses peuvent se décider, au bénéfice de toutes les entreprises, petites et grandes. On peut se saisir du contexte légal et discuter des modalités d'application entre partenaires sociaux. Dans mes déplacements sur les chantiers, en matière de TMS par exemple, on me présente régulièrement des exosquelettes qui permettent de soulager un opérateur sur des tâches précises. L'intérêt d'un organisme de prévention de branche est bien de décider de cibler les risques, d'identifier les moyens d'agir pour les prévenir et ensuite d'expérimenter par exemple l'utilisation de ces exosquelettes pour en tirer les leçons au service de toutes les entreprises du secteur. Je crois à ce type d'expérimentations communes que vous pratiquez déjà. Autre enjeu pour la branche : renforcer le travail de coordination de tous les acteurs du chantier avec les préventeurs, et y compris avec la maîtrise d'ouvrage. Sur les chantiers, de multiples intervenants, petites entreprises, salariés, intérimaires participent à un projet de construction commun. Il faut arriver à trouver au niveau de la branche une façon de faire pour que la démarche de prévention puisse s'organiser chacun à son niveau mais également collectivement dans une approche chantier. C'est bien là que le pas de la qualité vers une approche globale de la prévention sur le chantier va se faire dans les années qui viennent. À cet égard, les travaux que vous avez entamés sur la coordination de sécurité et de protection de la santé vont dans ce sens.

    La loi sur la santé au travail accorde une large place au document unique (DU). Elle prévoit que le programme annuel de prévention intégré au DU soit réservé aux entreprises d'au moins cinquante salariés, et non pas généralisé. Vous avez plaidé en ce sens.

    La réalité est que seule une entreprise sur deux réalise son DU. Mon propos n'était pas de dispenser les petites entreprises de réaliser leur DU mais de leur donner la possibilité de bien réaliser la première étape, identifier et évaluer leurs risques, puis de définir pragmatiquement les actions à mettre en œuvre, car cela correspond à leur besoin. Or, si on dit à une petite entreprise qu'un spécialiste va pouvoir l'aider à réaliser son DU, à construire sa fiche entreprise, sans en faire une usine à gaz et sans lui imposer le formalisme d'un programme annuel de prévention construit pour les grandes entreprises, elle en comprendra bien l'intérêt et cela l'aidera à mettre en œuvre ses actions adaptées pour diminuer son accidentologie. C'est ce que nous faisons avec cette loi, et l'OPPBTP a déjà de son côté des outils efficaces comme monDOCunique Prem's pour les accompagner.

    Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail (2) Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail. ©Ministères sociaux-Dicom-Emma Prosdocimi-Sipa

    Nous souhaitons mettre en place des dispositifs avec les médecins du travail pour accompagner

    les salariés en situation de fragilité.

    Profil

    Laurent Pietraszewski

    • Juillet 2020 : secrétaire d'État auprès de la ministre du Travail, de l'emploi et de l'insertion, en charge des retraites et de la santé au travail.
    • Mai  2020 : secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites et auprès de la ministre du Travail, chargé de la protection de la santé des salariés contre l'épidémie de Covid-19.
    • Décembre  2019 : secrétaire d'État auprès du ministre des Solidarités et de la santé, chargé des retraites.
    • 2017 à 2019 : député du Nord.
    • De 2010 à 2017 : responsable de la gestion des carrières, du recrutement et de l'évaluation professionnelle au sein d'un groupe privé dans la grande distribution.
    Profil

    Secrétariat d'État en charge des retraites et de la santé au travail

    Le secrétariat d'État prépare et met en œuvre, en lien avec les autres ministères concernés, les mesures de prévention et de suivi relatives à la santé au travail ainsi que les règles relatives aux régimes et à la gestion des organismes de sécurité sociale en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles.

    Pendant la crise de la Covid-19, il a notamment eu la charge de produire le protocole national en entreprise, régulièrement mis à jour. Il a également accompagné, au niveau sectoriel, la construction de quatre-vingt-dix protocoles produits par les employeurs dans le cadre du dialogue social, et permettant d'assurer la meilleure adaptabilité possible des règles aux spécificités de chaque secteur. Des outils ont aussi été réalisés en lien avec l'Anact pour accompagner les employeurs et les salariés lors des différentes phases de confinement et déconfinement, afin notamment d'appréhender au mieux le télétravail. Enfin, le secrétariat d'État a également organisé le déploiement de la campagne de vaccination en entreprise menée par les services de prévention et de santé au travail.

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