Jean-Christophe Repon, président de la Capeb

    ©Frédéric Vielcanet

    Élu l’année dernière président de la Capeb, Jean-Christophe Repon a pris ses nouvelles fonctions en pleine crise sanitaire. Dans ce contexte perturbé, il s’attache à faire reconnaître le poids économique des entreprises artisanales du bâtiment et leur capacité d’adaptation aux mesures de prévention.

    En résumé

    ● Jean-Christophe Repon a été élu président de la Capeb en juillet 2020.

    ● Il considère l’apprentissage comme un vecteur économique de l’entreprise artisanale.

    ● Pour être intégrée, la prévention doit faire la preuve de sa valeur ajoutée.

    Quelles sont vos priorités pour la Capeb et ses adhérents ?

    Les attentes de nos adhérents portent sur la reconnaissance des entreprises artisanales et de leur valeur ajoutée dans le tissu territorial et l’économie nationale. C’est le combat de la Capeb depuis sa création. Les artisans sont conscients du rôle social et économique qu’ils jouent sur l’ensemble du territoire. Bien que dénigrés, souvent peu considérés, ils sont un maillon fort, incontournable et essentiel de notre société.

    L’une des forces de la Capeb est le maillage territorial de ses adhérents…

    Du fait de leur taille et de leur multiplicité, les entreprises artisanales forment un tissu économique complexe, difficile à capter et à travailler. Pour autant, la réalité du quotidien, que ce soit en matière d’économie ou de prévention, est bien là. Voyez le Plan France Relance : il porte principalement sur la rénovation, s’appuie effectivement sur un maillage territorial, sur l’emploi et l’apprentissage. Autant de domaines que nous couvrons.

    ❛❛ Nous devons montrer aux jeunes l’opportunité que les métiers du bâtiment leur offrent en termes de revenus et de qualité de vie. La prévention en fait partie. ❜❜

    Jean-Christophe Repon, président de la Capeb

    Quelle importance, justement, accordez-vous à l’apprentissage ?

    L’apprentissage est tout simplement un des vecteurs économiques de l’entreprise artisanale. Près de 80 % des apprentis du bâtiment sont accueillis dans nos entreprises dont ils garantissent l’indépendance économique et le renouvellement des compétences. Quand l’activité du bâtiment redémarre, l’apprentissage redémarre dans les TPE du bâtiment (+ 12 % en 2020, NDLR). C’est d’autant plus important que nous allons avoir un besoin de repreneurs d’entreprise et d’apprentis qui deviennent entrepreneurs du bâtiment.

    Estimez-vous que les artisans se sont mieux adaptés à la crise actuelle marquée par la pandémie que les grandes entreprises ?

    De fait, nos chantiers ont rouvert plus rapidement que ceux des grandes entreprises. L’application des préconisations du guide de l’OPPBTP et la proximité des entreprises artisanales avec leurs clients ont permis de reprendre l’activité et de la poursuivre durant le second confinement. Nos TPE ont indéniablement fait preuve d’adaptabilité et de souplesse. Malgré une perte de 9 % d’activité en 2020, elles ont réussi à maintenir l’emploi dans un premier temps. Dans un second temps, et en partie aussi grâce aux aides gouvernementales, 15 000 emplois et 23 000 entreprises ont été créés. Notez que seulement 30 % des artisans du bâtiment ont utilisé le prêt garanti par l’État.

    Cette agilité que vous évoquez favorise-t-elle l’application des mesures de prévention, que ce soit dans le cadre sanitaire ou plus généralement ?

    Dans l’entreprise artisanale, le chef d’entreprise est souvent à la production. Il est donc lui-même concerné par le risque professionnel et par la prévention. Je pense que la Covid-19 doit être une opportunité pour agir différemment en matière de prévention, c’est-à-dire mettre à profit cette capacité à travailler ensemble pour faire progresser la santé et la sécurité des personnes. Je vois là un signal à donner aux artisans. Plutôt que comme une contrainte, la prévention doit être présentée comme une plus-value pour l’entreprise et ses salariés.

    ❛❛ Grâce à l’organisation de la filière et à la parution du guide sanitaire de l’OPPBTP, notre secteur n’a pas subi de mesures de fermetures administratives. ❜❜ ❛❛ Grâce à l’organisation de la filière et à la parution du guide sanitaire de l’OPPBTP, notre secteur n’a pas subi de mesures de fermetures administratives. ❜❜ ©DR

    Cette plus-value peut-elle être aussi envisagée sur le plan économique ?

    Le volet économique de la prévention au sein des TPE est à mon avis trop ignoré. Une entreprise qui travaille en sécurité, sur des chantiers propres, est forcément une entreprise qui gagne de l’argent. C’est cette vision économique de la prévention, abordée comme une plus-value pour l’entreprise, que l’OPPBTP et la Capeb doivent porter. Il y a certes les résultats sur la santé et la sécurité, les chiffres sur les accidents évités…,mais nous devons aussi convaincre les artisans que le respect des mesures préventives ou du document unique est un plus pour leur rentabilité.

    En matière de prévention des risques, l’accompagnement financier joue-t-il un rôle important pour les petites entreprises ?

    La démarche de prévention n’étant pas forcément naturelle pour les entreprises artisanales, les aides financières ont une fonction incitative. Cet accompagnement devrait être renforcé, d’autant que derrière chaque aide consentie par l’État se trouve une activité, de l’emploi et de l’impôt. Ces aides mériteraient d’être plus dynamiques et plus opérationnelles sur l’ensemble du territoire. Pour l’État, le retour d’investissement est rapide. Occupées par le quotidien, les entreprises artisanales sont rarement proactives, elles ne demandent pas spontanément des aides financières dédiées à des actions de prévention. Mais si la démarche est amorcée territorialement, elle a une chance d’être suivie. Il faut que les aides soient plus simples, lisibles et accessibles.

    La profession est-elle suffisamment solidaire autour de la prévention ?

    Il faut déjà noter la capacité de la filière du bâtiment à produire un guide de préconisations sanitaires face au coronavirus. La profession s’est prise en main, elle a négocié avec les ministères pour que nos salariés retournent au travail dans des conditions acceptables. Heureusement que l’OPPBTP s’est positionnée comme fer de lance du guide pour permettre la reprise de l’activité. Par le biais de la contrainte, cette situation de crise inédite met en évidence la légitimité et l’utilité de ce qui a été créé en matière de prévention des risques professionnels. Le bâtiment est un des rares secteurs d’activité qui ait relevé la tête dans cette période difficile. En grande partie grâce à ce guide.

    ❛❛ Avec + 1,5 %, l’activité de l’artisanat du bâtiment accélère sa croissance au 4e trimestre, malgré une année 2020 marquée par une baisse globale de 9 %. ❜❜ ❛❛ Avec + 1,5 %, l’activité de l’artisanat du bâtiment accélère sa croissance au 4e trimestre, malgré une année 2020 marquée par une baisse globale de 9 %. ❜❜ ©Frédéric Vielcanet

    Sur quels sujets de prévention portent les actions de la Capeb ?

    Ces dernières années, la problématique de l’amiante a fortement mobilisé nos entreprises, notamment au travers de Carto Amiante. À l’avenir, nous souhaitons effectuer une étude et une analyse plus poussées de nos métiers, pour mieux les définir et les valoriser. De ce point de vue, le travail mené en partenariat avec l’Iris-ST et l’OPPBTP sur des dispositifs innovants en matière de prévention est essentiel.

    Quel est le message à faire passer pour que la prévention soit envisagée comme un facteur de compétitivité ?

    À mon avis, pour être entendu, il ne faut pas parler de contraintes, mais mettre en avant et faire la preuve de la plus-value induite par la démarche. L’artisan sait très rapidement où se situe sa rentabilité et il est prêt à faire un effort financier si c’est pour améliorer les conditions de travail, que les salariés se sentent mieux dans l’entreprise et en soient fiers. Si le salaire et l’évolution des compétences ne suffisent pas, certainement qu’il faut faire plus sur la partie sociale, le mieux-vivre et la prévention.

    PROFIL

    Identité. Maître artisan électricien à Toulon dans le Var, Jean-Christophe Repon est depuis juillet 2020 le président de la Capeb. Élu administrateur national depuis l’assemblée générale de 2006, il en a été le trésorier adjoint, puis le premier vice-président en charge des affaires sociales et de la formation.

    Son parcours.

    • Vice-président de l’U2P.
    • Président depuis 2020 de l’Iris-ST.
    • Vice-président du CCCA-BTP depuis 2018 (président de 2016 à 2018).
    • Administrateur chez Constructys depuis 2011 (président de 2016 à 2019).
    • Ancien champion de France (1991-1992) avec le Rugby-Club de Toulon.
    La Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb)

    La Capeb est le syndicat patronal représentant l’artisanat du bâtiment, secteur qui dénombrait, en 2020, 557 306 entreprises employant moins de 20 salariés (soit 99 % des entreprises du bâtiment). Ces entreprises réalisent 86,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires, soit 60 % du chiffre d'affaires du Bâtiment. Fondée en 1946, la vocation de la Capeb est celle d’une organisation professionnelle représentative : promouvoir, représenter et défendre les intérêts matériels et moraux de ses adhérents, les entreprises artisanales du bâtiment. À ce titre, la Capeb est consultée par les pouvoirs publics sur l'ensemble des projets de textes législatifs et réglementaires intéressant le secteur. La Capeb dispose d’un maillage territorial serré, au plus près des entreprises, et leur offre un service de proximité sur l'ensemble du territoire grâce à 103 Capeb départementales et 12 Capeb régionales.

    Magazine mensuel : Le Bâtiment Artisanal.

    Sites web:www.capeb.fr

    www.artisans-du-batiment.com/

    etwww.eco-artisan.net

    Portrait chinois
    • Votre mot préféré ? Le partage.
    • Le mot que vous détestez ? Le mépris.
    • Votre addiction favorite ? Le sport.
    • Le son, le bruit que vous aimez ? La mer.
    • Le son, le bruit que vous détestez ? La rumeur.
    • Un homme ou une femme pour illustrer un nouveau billet de banque ? Nelson Mandela.
    • Le métier que vous n’auriez pas aimé faire ? Aucun.
    • Votre bâtiment préféré ? Le Guggenheim de New York.
    • La plante, l’arbre ou l’animal dans lequel vous aimeriez être réincarné ? L’oiseau : l’aigle royal.

    Interview parue dans le numéro 249 du magazine PréventionBTP, mars 2021.

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