Conditions de reprises en sous-œuvre

    La reprise en sous-œuvre des fondations d'un bâtiment s'impose sur des chantiers très divers : implantation d'un ouvrage contre un bâtiment mitoyen (le niveau d’assise de la future construction étant inférieur à celui de l’existant) ; construction ancienne en mauvais état ; terrain ayant subi des déformations (intempéries, inondations, sécheresses) ; projet de réhabilitation avec aménagement en superstructure ou en sous-sol de charges supplémentaires (ascenseur…) ou de matériaux lourds (extension, remplacement d'étages de planchers en bois par des planchers en béton, par exemple).

    Ces reprises sont exécutées dans la zone de transmission des charges d’une construction existante au terrain de fondation. Les règles de sécurité visent à prévenir de nombreux risques pour les travailleurs et les riverains : effondrement, fissures ou lézardes dans la construction ancienne par suite de la décompression du sol ou de la vibration des engins ; éboulement de terre dans la zone de travail ; chute de pierres ou autres matériaux sur les travailleurs ; chute de hauteur dans les fouilles ; contact ou endommagement liés à des réseaux souterrains (câbles électriques, canalisations d’eau, de gaz, d'hydrocarbures...) ; asphyxie par émanations de gaz délétères ou accumulation de gaz carbonique.

    Étude préalable pour une reprise en sous-œuvre

    Dans tous les cas, un projet de reprise en sous-œuvre et la méthode d’exécution s'appuient sur une documentation solide, très détaillée.

    Les plans des fondations et de la construction à reprendre : constitution, nature et état des fondations, épaisseur et niveau inférieur de leur assise, poids de la construction, valeur et répartition des charges et surcharges qu’elle supporte... À défaut de plans, vous devrez les reconstituer (par collecte d'informations, forages dans les fondations, sondages...). Le but est de déterminer s’il existe sous les murs une semelle de répartition des charges et si les installations existantes (voûtes de cave, bâtiment mitoyen...) exercent sur les murs enterrés du nouvel ouvrage des poussées horizontales ou latérales, qu'il faut reporter sur un sol d'assise inférieur.

    L'étude de sol (par collecte d'informations, reconnaissance du sol...) : compressibilité (sol rarement homogène), diversité des couches, pendage des couches géologiques, accidents du terrain en profondeur (fontis, carrières souterraines), caractéristiques physiques et mécaniques, niveau de la nappe phréatique et variations, présence de conduits d'évacuation, réseaux électrique ou gaz... Un expert en géotechnique établit une note de calcul. Le but est de déterminer la capacité portante ­du terrain d’assise. Le bureau d'études de sol et l'ingénieur béton s'accordent sur le diagnostic et les solutions à mettre en œuvre.

    Mesures conservatoires pour les constructions existantes

    Avant les travaux

    L'excavation de terres sous les fondations ou en bordures des constructions existantes et mitoyennes fait l'objet d'une étude d'impact approfondie assortie d'éventuelles mesures de prévention supplémentaires :

    • Pour la reprise d'une construction de mauvaise qualité : étayer les planchers et réaliser autour des baies un encadrement solide pour étayer les linteaux et étançonner les jambages, voire procéder à des renforcements. Veiller au choix et au dimensionnement des étaiements provisoires.
    • Pour la reprise d'un mur mitoyen : utiliser des étais, ancrages, etc.

    Au cours des travaux

    Surveiller l’ensemble de la construction nouvelle tant qu'elle n’a pas atteint le niveau du sol de la construction existante voisine : des capteurs (surveillance topographique automatique) ou des témoins en plâtre datés sur les fissures anciennes ou récentes permettent de s’assurer de la stabilité du terrain et du bâtiment.

    Si la construction existante exerce des poussées horizontales ou latérales : placer des dispositifs capables de résister à ces efforts (étaiements, tirants avec ancrages, etc.) et les maintenir jusqu’à ce que les poussées sur le mur à reprendre soient absorbées (par la construction nouvelle ou par la construction ancienne après aménagements).

    En l'absence de semelle de répartition, construire une poutre continue en béton armé sous la fondation à reprendre, par tronçons successifs. Cette poutre prolonge le mur avec plus de sécurité jusqu’au niveau inférieur prévu par le projet (identique à celui des fondations de la nouvelle construction).

    Si le mur du bâtiment est à reprendre en sous-œuvre : renforcer le blindage de la tranche d’excavation correspondant aux murs porteurs perpendiculaires (sol intérieur fortement chargé dans ces zones) ; si nécessaire, faire une amorce de mur en sous-œuvre sous chaque mur porteur perpendiculaire au mur à reprendre.

    Les procédés de reprise en sous-œuvre

    Deux conceptions sont possibles dans le projet d’exécution.

    • Soit le mur construit en sous-œuvre soutient la construction ancienne et la fondation du nouveau bâtiment est indépendante : veiller à maintenir l’indépendance de l’ancienne et de la nouvelle construction en élévation et fondation.
    • Soit les deux bâtiments sont solidaires et le mur construit en sous-œuvre sert de fondation commune : s’assurer que les tassements de la nouvelle construction ne provoquent pas des désordres dans l’ancienne construction.

    Dans les deux cas, le mur à construire en sous-œuvre et le terrassement qu’il nécessite sont exécutés par petites parties indépendantes, de longueur variable suivant la nature du terrain.

    La reprise par puits alternés

    Ce procédé est utilisé pour des reprises de fondations sur des hauteurs de 3 à 8 mètres (quelquefois plus), sur des terrains de faible superficie.

    Avantages : le mur à construire en sous-œuvre est un véritable dispositif de soutènement, capable de supporter à la fois les charges verticales et les poussées du terrain. L’étaiement de l’existant et le dégagement des fondations existantes évitent la réalisation d'un terrassement général préalable aux travaux.

    Principe du phasage alterné : les terres sous les fondations existantes sont excavées par couches successives et, dans le même temps, tout le pourtour de la fouille est blindé systématiquement sur 3 ou 4 faces. Avant d'entreprendre l'excavation et le blindage de la couche suivante, les trois autres parois sont pourvues de supports temporaires (poutres en bois...) ancrés les uns aux autres. Cette opération est répétée à plusieurs reprises jusqu'à l'obtention d'une paroi continue selon un phasage alterné des tranches, tranches en attente / tranches terminées aptes à supporter à elles seules la construction existante.

    Suivant la hauteur et les conditions de terrain, on peut exécuter la totalité de chaque tranche en une seule fois ou faire plusieurs reprises successives, par exemple pour réaliser d’abord une semelle armée de répartition des charges.

    Précautions pour éviter un effondrement et protéger les puits des vibrations et des infiltrations

    • Solidariser les tranches entre elles pour avoir un mur monolithe. Si c'est un mur en maçonnerie : disposer aux extrémités des arrachements pour reprise et les répartir sur toute la hauteur. Si c'est un mur en béton (armé ou non) : laisser en attente des armatures de reprise d’une longueur suffisante.
    • Bloquer le mur construit en sous-œuvre au terrain arrière, de façon à éviter toute décompression ultérieure du sol (risques de tassement et fissuration des maçonneries).
    • Tant que ce mur n’a pas atteint une résistance suffisante, installer une butée provisoire contre le terrain pour équilibrer les poussées.
    • S'il faut attendre le bétonnage des planchers de la nouvelle construction pour que ce mur remplisse son rôle de soutènement, assurer provisoirement sa stabilité avec des dispositifs étudiés pour gêner le moins possible les autres phases de travaux : étais inclinés, contreforts, tirants ancrés à l’arrière.

    Règles générales de sécurité

    • Interdire l'accès des camions chargés d’évacuer les déblais en bordure immédiate du puits (risques d'écroulement) en approvisionnant en une fois le bois nécessaire à la totalité de l’opération.
    • S’assurer de l’absence de carrières souterraines sous l’emprise des constructions et de leurs abords (elles rendraient obligatoires des travaux préalables de consolidation).
    • Éviter les infiltrations d’eau pendant les travaux (caniveaux...). Canaliser le plus loin possible les eaux pluviales de l’immeuble voisin. Protéger un terrassement général, protéger la banquette et le talus avec des bâches imperméables.

    Autres procédés de reprise en sous-œuvre

    Chacun de ces procédés diminue les risques et assure une meilleure sécurité des travailleurs.

    Les parois moulées dans le sol

    Procédé utilisé dans les travaux publics et les fondations profondes d’immeubles en site urbain ou parkings.

    Principe : avant le terrassement général et en bordure immédiate des constructions ou de leurs fondations existantes, on creuse mécaniquement une tranchée en maintenant les parois par une boue de forage (bentonite), puis on bétonne le mur à l’aide d’un tube plongeur, suivant la même technique que celle du bétonnage sous l’eau.

    Avantages : ces panneaux (4 à 6 mètres de longueur) évitent les décompressions du sol et les éboulements.

    Conditions de réalisation : le mur à reprendre possède une semelle de fondation armée ; à défaut, en constituer une avant d’exécuter la paroi moulée.

    Les micropieux

    Procédé utilisé dans le cas de la reprise en sous-œuvre d'une semelle de fondation indépendante, pour des profondeurs de reprises importantes (15 à 20 mètres en moyenne, jusqu'à 80 mètres), fondations massives ou consolidations d’ouvrage (jusqu’à plusieurs centaines de tonnes).

    Principe : les fondations existantes sont traversées par une série de forages rotatifs de petit diamètre (50 à 200 mm) orientés dans différentes directions, armés sur toute leur longueur par un acier unique ou une cage d’armatures et scellés par un béton injecté sous pression.

    Avantage : ce procédé limite l'apparition de tassements.

    Le jet grouting

    Procédé utilisé dans le cas de la reprise en sous-œuvre d'une semelle de fondation indépendante, à proximité de mitoyen ou dans des sites difficiles limités en hauteur, les profondeurs pouvant atteindre 85 mètres. Coût important.

    Principe : des colonnes, demi-colonnes ou panneaux de sol-ciment sont réalisés par jet de fluide à haute pression autodurcissant sur un terrain meuble (argile, sable...) après forage en petit diamètre (10 à 20 cm).

    Avantage : limite l'apparition de tassements.

    Les pieux foncés par vérins sous la fondation à reprendre

    Procédé adapté aux sites exigus qui se prêtent au fonçage, aux chantiers modestes.

    Principe : des pieux (métalliques ou en béton armé) sont enfoncés par pression et par tronçons successifs au moyen d’un vérin hydraulique prenant appui sous la fondation à reprendre. Le premier élément de pieu est muni d’une pointe renforcée favorisant son enfoncement. Les autres éléments viennent se superposer par emboîtement. Les évidements intérieurs sont remplis de béton pour réaliser un pieu continu.

    Lorsque le refus est obtenu, bloquer des cales entre la tête du pieu et la semelle, retirer le vérin et procéder au clavage.

    Avantage : ce procédé supprime tout risque de décompression du sol ; il permet un contrôle de la force portante des pieux ; il ne produit ni bruit, ni vibrations, ni chocs, ni fumées.

    Condition de réalisation : le mur à reprendre doit posséder une semelle de fondation armée ; à défaut, en constituer une avant de foncer les pieux, car on risquerait de fissurer, voire de disloquer l’ancienne fondation. Veiller à bien choisir les points d’appui.

    Pour le relevage / redressement d’une construction ancienne : enfoncer d’abord tous les pieux au refus puis procéder au relevage soit avec quelques vérins - les autres pieux servant d’appui pour un calage provisoire -, soit en agissant sur tous les pieux en même temps à l’aide de vérins plats et de calages prenant appui sur les pieux.

    Les pieux forés encadrant le mur

    Principe : deux files de pieux sont exécutées de chaque côté et le plus près possible du mur ; les charges de l’ouvrage sont reportées sur ces pieux par l’intermédiaire de poutres semelles et de consoles en béton armé exécutées sous le mur par petites parties.

    Les pieux sont forés au trépan ou à la tarière, et tubés par éléments de faible longueur assemblés par filetage. Ces tubes sont remontés au cours du bétonnage et récupérés un par un.

    Chaque pieu est terminé par une tête élargie et évidée de façon à ménager l’emplacement d’un vérin hydraulique. La pression est réglée de manière à imprimer aux pieux un effort au moins égal à la charge définitive. Quand les pieux ne s’enfoncent plus, disposer un calage, retirer les vérins et procéder au clavage.

    Condition de réalisation : les deux côtés du mur à reprendre sont accessibles.

    Avantage : peu encombrant ; un sous-sol de cave est suffisant pour la mise en œuvre du procédé.

    La consolidation préalable du terrain

    Certains procédés permettent de consolider les mauvais terrains : injections de ciment ou de produits spéciaux, congélation à la saumure ou à l’azote liquide dans les terrains aquifères. Moyennant leur mise en œuvre préalable, on peut opérer la reprise en sous-œuvre dans de très mauvais terrains en employant les méthodes manuelles classiques.

    La géomembrane

    Une géomembrane peut être déployée en périphérie de la construction : cette barrière étanche isole les fondations des variations hydrométriques (norme NF P84-510).

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