Pourquoi les bonnes pratiques peinent-elles à s’installer ?
La question de l’hygiène s’était imposée sur les chantiers pendant le Covid, mais le coût et la logistique restent un frein pour beaucoup d'entreprises. Le point avec Agathe Himeur de Présantra.
Dernière mise à jour le : 25/09/2025
Goulven Connan

Les conséquences du manque d’hygiène impactent la santé des compagnons et peuvent augmenter le risque d’accident. La responsabilité, l’image et l’attractivité des entreprises sont en jeu. Le point avec Agathe Himeur de l'association en santé au travail Présantra.
Qu’en est-il de la prise de conscience des enjeux liés à l’hygiène dans les entreprises ?
Les questions d’hygiène sur les chantiers ont été mises en avant brutalement au moment du Covid. Sur les petits chantiers, la mise à disposition de jerricans d’eau et de savon pour l’hygiène des mains s’était fortement développée, mais nous observons que cela tend à disparaître. Concernant les sanitaires et toilettes, la situation ne s’est pas beaucoup améliorée, même si quelques TPE commencent à s’équiper en toilettes mobiles. Il y a aujourd’hui une prise de conscience des différents enjeux liés à l’hygiène mais c’est l’application qui est plus difficile. Pour beaucoup d’entreprises, il y a cette idée que les équipements d’hygiène restent chers et difficiles à mettre en place.
Le budget est-il donc le principal frein ?
Oui, l’argent et les contraintes logistiques du chantier. Lorsqu’une entreprise rénove un appartement au troisième étage, en plein centre-ville avec l’eau coupée, il ne reste que la solution du café en bas de l’immeuble. Il y a aussi une certaine méconnaissance de la réglementation, notamment dans les petites entreprises où il n’y a pas de salariés dédiés aux questions d’hygiène, de sécurité et de prévention. Et il y a cette culture persistante du BTP où l’on travaille un peu « à la dure » et on ne se plaint pas. Mais c’est en train de changer, les nouvelles générations font beaucoup plus attention aux conditions de travail, car elles sont davantage sensibilisées au cours de leur formation. Cela est positif et peut rejaillir sur les plus anciens.
Quelles sont les premières conséquences du manque d’hygiène sur les chantiers ?
Il s’agit des virus et bactéries qui vont se propager beaucoup plus facilement avec le manque d’hygiène des mains ou l’ingestion de résidus de produits nocifs. Cela impacte la santé des compagnons et entraîne des arrêts de travail. Ne pas pouvoir subvenir à ses besoins naturels peut avoir des effets sur la santé mentale, provoquer une fatigue générale, un mal-être et des pertes d’attention et de concentration. Cela augmente le risque de ne pas bien effectuer son travail ou, plus grave, d’avoir un accident. Nous avons recueilli les témoignages de femmes, mais aussi d’hommes, qui envisagent de changer de métier en raison de conditions d’hygiène insuffisantes et de l’absence d’intimité pour faire leurs besoins. Tout cela a un impact négatif sur l’image des entreprises et leur attractivité.
Il y a cette culture persistante du BTP où l’on travaille un peu « à la dure » et on ne se plaint pas.
Agathe Himeur
Agathe Himeur, ingénieure en prévention des risques, est responsable du pôle prévention chez Présantra. Cette association de prévention et santé au travail accompagne 2 500 entreprises du BTP dans le Finistère (23 000 salariés), dont une grande majorité de TPE/PME.