En milieu urbain, la complémentarité des méthodes et de l’expérience
À Strasbourg, la réhabilitation et l'extension d’un Ehpad combine l’anticipation des méthodes avec l’expérience des compagnons au service du projet et de la sécurité.
Date : 29/11/2024
Loïc Féron

● Un chantier technique de réhabilitation-extension en milieu urbain.
● Une étroite collaboration entre les méthodes et la prévention.
Reportage paru dans PréventionBTP n°288-Octobre 2024-p. 15
Identité
Maître d’ouvrage : Fondation Vincent de Paul
Maître d’œuvre : GKG Architectes, MH Ingénierie, Artelia, C2Bi
Entreprise : Dicker Groupe Seltz
CSPS : Bureau Veritas
Effectif en pointe : 5 salariés
Début du chantier : juin 2023
Durée du chantier : 33 mois (dont 12 de gros œuvre)
Coût : 13 millions d’euros (dont 2,2 en gros œuvre)
Conseillère en prévention OPPBTP : Laurie Zimmer
Propriété de la fondation Vincent de Paul, la maison de retraite Saint-Gothard fait l’objet d’une importante opération de réhabilitation et d’extension. À la livraison, en 2026, l’Ehpad aura une capacité supplémentaire de 30 lits (de 97 à 127 chambres). Démolition, conservation, curage, reprise en sous-œuvre, agrandissement… le chantier, très technique, a été confié à l’entreprise Dicker Groupe Seltz. Ses deux chefs de chantier travaillent en étroite collaboration, tant sur la zone centrale de réhabilitation (80 % des travaux) que sur la partie périphérique neuve (20 % des travaux), construite en limite de propriété. Le tout sur six étages.
Une grue à tour en pleine rue
Le contexte urbain est l’une des spécificités de ce chantier, littéralement situé au-dessus d’une crèche (en rez-de-chaussée et premier étage). Un arrêté « bruit » oblige l’entreprise à cesser toute activité trop sonore (comme le sciage) au moment de la sieste… L’autre contrainte est le peu, voire l’absence, de place disponible dans la zone chantier. Au point qu’un autre arrêté a dû être pris pour bloquer la rue adjacente et y installer la grue à tour. « Le coût s’élève à environ 100 000 euros pour une année, explique Laurent Dorschner, responsable de travaux chez Dicker Groupe Seltz. Mais sans cela, ce projet était irréalisable. » L’exiguïté du site impacte aussi les modes opératoires. Dans l’impossibilité d’approvisionner le chantier en prédalles, l’entreprise a investi dans l'outil de coffrage Gridflex de Peri pour réaliser des dalles pleines. En façade, la solution des prémurs a été retenue, les faibles capacités de stockage nécessitant un planning de livraison précis et rigoureux.
Adapter les méthodes au projet
Faute de place, une base vie intérieure a été aménagée dans le bâtiment. En plus du réfectoire et des bureaux, elle comprend des vestiaires et sanitaires distincts hommes-femmes, car sur ce chantier interviennent une compagnon du devoir et une stagiaire en DUT Génie civil. Côté logistique, l’ascenseur existant a été protégé pour monter les matériels et les personnes aux différents niveaux. « Quarante-cinq tonnes de profilés métalliques ont été utilisées pour reprendre la toiture en sous-œuvre, poser des linteaux et créer des ouvertures, explique Laurent Dorschner, qui a dû adapter les méthodes au projet architectural. Cette réalisation complexe est rendue possible et sûre grâce à l’acquisition de matériels, à la formation et à la capacité de nos compagnons s’adapter aux modes opératoires. »
Cette réalisation complexe est rendue possible et sûre grâce à […] la capacité de nos compagnons à s’adapter aux modes opératoires.
Un travail conjoint sur les méthodes et la sécurité
« Nous avons gagné l'appel d'offres sur la note technique et sur notre capacité à répondre dans le détail à des problématiques complexes », estime Laurent Dorschner. Cette technicité, l’entreprise parvient sur ce chantier à l’associer à la performance économique et à la prévention des risques grâce
à une concertation permanente entre les méthodes (productivité et qualité) et la responsable QSE (sécurité du poste de travail).
« Appliqué à ce chantier par Dicker, ce principe d’adéquation entre la méthode proposée et la sécurité est généralisé à l’ensemble du groupe Seltz, précise le directeur de travaux. Je me considère comme un plan-guide, je propose des options, puis Éric (Traeger), le chef de chantier, et Sarah (Heitz), notre QSE, vérifient si cela fonctionne sur le plan de la sécurité ».
« Au démarrage du chantier, nous étudions le PIC et nous passons en revue les méthodes, poursuit Sarah Heitz. Certaines peuvent exiger des protections collectives différentes de celles que nous possédons et dans lesquelles nous devons investir. » En réhabilitation, les aléas se découvrent aussi au fur et à mesure de l’avancement. Par exemple, quand, au cinquième étage, la dalle est posée en sens inverse des autres niveaux.
« Il faut alors s’adapter et chercher rapidement une solution avec l’aide du bureau d’études. »
Focus sur les actions de prévention

Scie radiale
Pour remplacer une scie circulaire sur table, Dicker expérimente l’utilisation d’une scie radiale plus sûre, équipée d’un système de captation des poussières et manœuvrable une fois repliée sur un chariot.
Un point sur les non-conformités et les actions à mettre en place
Une fois par mois, je réalise un audit sur le chantier pour m’assurer que les personnes travaillent en sécurité, je vérifie notamment que les protections collectives sont en place et les EPI bien portés. C'est l’occasion de faire un point avec le chef de chantier sur les non-conformités et les actions à mettre en place ou d’aborder des questions de méthode pour les semaines à venir. ❜
Sarah Heitz, responsable QSE du Groupe Seltz
L'excellente coordination des acteurs
Incluant de la démolition, du curage, de la reprise en sous-œuvre, sans parler des problématiques de nappe phréatique fluctuante, ce chantier est l’un des plus techniques que j’ai eu à suivre en gros œuvre depuis trente ans. Heureusement, l’entreprise Dicker est moteur dans la recherche de solutions, et nous disposons, dans le groupement maîtrise d’œuvre, d’un très bon ingénieur. À titre personnel, je passe beaucoup de temps sur ce chantier, mais il faut saluer le travail collectif et l’excellente coordination des acteurs.
Laurent Gilch, architecte (cabinet GKG)
S'appuyer sur les méthodes et l'expérience des compagnons
La partie réhabilitation du chantier génère de nombreux d’aléas qu’il faut gérer en s’appuyant sur les méthodes et sur l’expérience des compagnons. De quinze à vingt-cinq ans d’ancienneté, ces collaborateurs détiennent le savoir-faire et la faculté d’adaptation qui permettent de réaliser ce type d'ouvrage. Ce sont des passionnés, qui plus est, concernés par l’approche sécurité encouragée par l’entreprise.
Laurent Dorschner, responsable de travaux chez Dicker Groupe Seltz
Le + prévention : La mise en œuvre des plats carbone

Un poste de renforcement structurel
Sur la partie existante du bâtiment, l’entreprise Dicker a mis en place un poste de renforcement structurel à l’aide de plats carbone. Mille mètres de lamelles de 5 cm de large et d’à peine plus d’un millimètre d’épaisseur viennent en renfort des planchers béton destinés à recevoir des bacs à douche. Pour éviter les TMS, les plats carbone, livrés en rouleaux par le fabricant SP Renforcement, sont amenés sur la table de découpe à l’aide d’une dérouleuse.