La centrale à béton, pièce maîtresse d’un chantier bas carbone
Sur l’île de Nantes, la réalisation des blocs 2 et 3 du CHU s’appuie sur la production de bétons in situ et l’optimisation des flux logistiques.
Date : 29/07/2024
Loïc Féron

● Des solutions d'optimisation de la logistique.
● L’accompagnement des équipes sur les méthodes constructives.
Reportage paru dans Prévention n°286-Juillet-Août 2024-p. 15
Identité
Blocs 2 et 3 (7 bâtiments)
Maître d’ouvrage : CHU de Nantes
Maître d’ouvrage mandataire : Soderec
Maître d’œuvre : Patriarche (architecte), Edeis, Builders and Partners (ingénierie)
Entreprises : Vinci Construction, mandataire ; ETPO (bâtiments techniques et sous-traitance) ; Bottes Fondations.
CSPS : Dekra
Effectif en pointe : 300 personnes
Coût : 277 millions d'euros
Début du chantier : 2022
Livraison : fin 2026
Ingénieur en prévention OPPBTP : Laurent Dalibert

Sur les onze hectares de l’ancien marché d’intérêt national (MIN) s’étend, au cœur de l’île de Nantes (Loire-Atlantique), le plus gros chantier hospitalier d’Europe. Organisé en quatre blocs pour douze bâtiments reliés par des passerelles, le futur CHU (1 527 lits et places, 57 salles de bloc opératoire, 90 % de chambres individuelles) va s’inscrire, à compter de 2027, dans un nouveau quartier dédié à la santé. Vinci Construction, en charge de deux des quatre lots attribués, réalise sept bâtiments : les blocs opératoires, l’imagerie, les urgences, les soins critiques, un laboratoire et un ensemble femmes-enfants-adolescents.
La massification des bétons bas carbone
Au total, 125 000 m3 de béton vont être coulés dans ce gigantesque projet. Pas n’importe quel béton ! Le groupe français concrétise sa démarche Exegy de massification des bétons bas carbone. 100 % des bâtiments construits ici en bénéficient. Conçu à base de filler calcaire et de laitier de haut-fourneau, le béton mis en œuvre pour les fondations, les voiles et les planchers affiche une substitution du clinker de 50 à 80 %. À l’échelle du chantier, c’est une réduction d’environ 45 % du CO2 qui est visée. Quant aux trois cents volées d’escaliers, préfabriquées et livrées sur place depuis la Vendée, elles ont été conçues dans un béton très bas carbone (moins 70 % de CO2) à base de filler calcaire et de métakaolin.
Une démarche globale à l’échelle du chantier
Cette expertise technique s'accompagne de solutions d'approvisionnement et d'optimisation de la logistique. Pour remédier entre autres au manque de place, Vinci Construction a créé son propre lot logistique, placé sous la responsabilité du groupe Idea. Les méthodes constructives et l'accompagnement des équipes pour les mettre en œuvre sont également impactés. « L’installation de la centrale à béton sur site constitue une forte valeur ajoutée dans la maîtrise de la chaîne de production et l’optimisation de l’empreinte carbone », commente David Gouttebelle, préventeur grand projet chez Vinci Construction. Sept à huit toupies (et jusqu’à douze lors du coulage du parvis) alimentent chacun des chantiers autonomes équipés d’une grue à tour. Le principe de l’encadrement est le suivant : un chef de chantier et un conducteur de travaux par grue, plus un directeur de travaux pour trois grues.
La centrale à béton sur site est une valeur ajoutée dans la maîtrise de la chaîne de production.
Un lot logistique à hautes valeurs ajoutées
Vinci Construction a confié la partie logistique du chantier à Idea Groupe dont la prestation couvre plusieurs activités. « En phase gros œuvre, nous gérons les approvisionnements en agrégats qui alimentent la centrale
à béton, puis la planification des livraisons des toupies », explique Albéric Lacombe, responsable de site chez Idea. Plus généralement, le logisticien gère les flux physiques entrants sur le chantier, avec l’aide d’un homme trafic, ainsi qu’un magasin de consommables. « La livraison au juste besoin, juste à temps, évite de mobiliser des surfaces de stockage sur le chantier. »
La mise à disposition des matériels, tous corps d’état confondus, est l’autre grand volet du service fourni par Idea. Depuis une plate-forme logistique située à quelques kilomètres, près du pont de Cheviré, le logisticien réceptionne au fil de l’eau les matériels commandés par les sous-traitants de Vinci Construction et les livre à la demande sur le chantier. Un stockage tampon est assuré pour les grosses pièces (châssis de baies vitrées, plaques de plâtre…) avant préparation et livraison sur le chantier.
La logistique s’effectue ensuite à la fois horizontalement, avec des camions, mais aussi verticalement, avec la montée des matériels et matériaux via un lift réservé au préalable par chaque entreprise. « L’approvisionnement à pied d’œuvre des bons matériels aux bons endroits permet aux entreprises de se concentrer sur leur cœur de métier », commente Albéric Lacombe. Idea se charge également de récupérer les chariots à déchets spécifiques mis à disposition sur les différents niveaux. Redescendus via le lift, ils sont vidés dans de grandes bennes puis remontés pour servir de nouveau.
Focus sur les actions de prévention

Centrale à béton in situ
La centrale à béton sur site permet d’économiser les rotations de camions à l’extérieur, et de limiter la circulation sur l’île de Nantes (division par dix des flux de camions). À raison de 400 m3 de béton par jour, sept à huit toupies alimentent le chantier en béton bas carbone.
L’industrialisation du process logistique
Notre accompagnement porte sur l’industrialisation du process logistique et sur la gestion des flux informatiques. Les données collectées, notamment sur les consommations d’agrégats et les ratios de béton bas carbone, permettent à Vinci Construction de capitaliser sur cette réalisation et d’être plus performant.
Albéric Lacombe, responsable de site chez Idea.
La sécurisation des modes opératoires
Permanent sur le chantier depuis son lancement, je suis en relation avec le bureau des méthodes pour m’assurer de la sécurisation des modes opératoires. J’accompagne les conducteurs de travaux et les chefs de chantier sur le site pour faire appliquer les bonnes pratiques, effectuer les briefings de poste et organiser les quarts d’heure sécurité. Physiquement, ce chantier de taille XXL est très éprouvant, notamment pour les encadrants qui parcourent quotidiennement une dizaine de kilomètres.
David Gouttebelle, préventeur grand projet pour Vinci Construction.
L’organisation, enjeu majeur du chantier
Pour Vinci Construction, l’enjeu majeur de ce chantier est son organisation. Notre réponse consiste dans l’implantation sur site de la centrale à béton et la création de notre propre lot logistique pour gérer les flux. La décomposition de cet énorme chantier en neuf unités et autant de grues nous permet de bénéficier de l’effet macro, avec une unité de production intégrée, mais aussi de l’effet proximité, avec des interventions rapides et ciblées.
Fabien Froment, directeur du projet du nouvel hôpital pour Vinci Construction
Le + prévention : La gestion centralisée des interférences de grues

Une forte coactivité entre les blocs
Depuis septembre dernier, les quatre blocs du chantier du CHU (dont deux attribués à Vinci Construction) mobilisent quinze grues à tour. Selon les jours de la semaine et les heures de la journée, certaines des grues, plus ou moins espacées, travaillent en simultané quand d’autres sont à l’arrêt. Sur ce projet gigantesque, l’intense coactivité au sein d’un même bloc et avec ceux voisins nécessite une gestion centralisée des interférences entre grues.