En Isère, un accompagnement en prévention pour les maîtres d’ouvrage publics
Une première expérimentation pilotée par la Capeb Isère et menée avec la Carsat Rhône-Alpes, la DDETS Isère et l’OPPBTP auprès de trois intercommunalités va permettre d’aller plus loin dans la sensibilisation des donneurs d’ordres publics à leurs responsabilités en matière de sécurité sur les chantiers.
Date : 02/12/2025
Chloé Devis
© DR
À l’origine du projet Cap Prévention Chantier, il y a une première alerte, lancée par le préfet de l’Isère au lendemain de la pandémie de Covid, concernant la recrudescence des accidents du travail dans le secteur du BTP. En 2023, leur nombre s’élevait encore à 10 500, dont 1 450 dans le seul département de l’Isère.
Outiller les donneurs d’ordres pour impulser une nouvelle dynamique collective
Pour enrayer cette tendance préoccupante, la Capeb Rhône-Alpes décide de passer à l’action en concentrant ses efforts sur les maîtres d’ouvrage publics. Elle est rejointe par la Carsat Rhône-Alpes, la DDETS (Direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités) Isère et l’OPPBTP. « L’idée était d’intervenir le plus en amont possible de la chaîne de responsabilités, au niveau de la commande publique, pour toucher par ricochet les entreprises privées du bâtiment et leurs sous-traitants », explique Virginie Guichard, présidente de la Capeb Isère.
Unis par une convention de partenariat, les acteurs locaux de la prévention sont animés par un objectif commun : améliorer la prise de conscience des donneurs d’ordres quant à leurs obligations de sécurité dans le cadre de leurs opérations.
Des outils existants adaptés aux enjeux sécurité de la maîtrise d’ouvrage publique
La construction du projet s’appuie sur l'adaptation d'un outil propre à la Carsat, les fiches TOP (Thèmes opérationnels prioritaires), aux spécificités des collectivités locales, qui constituent la cible de la démarche. Parmi les axes prioritaires définis figurent « les risques les plus présents dans le secteur, les chutes de hauteur et les TMS, ainsi que l’hygiène sur les chantiers », détaille Christine Peylin, contrôleur de sécurité BTP de l’organisme. Ils incluent également les relations entre le maître d’ouvrage, le CSPS et la maîtrise d’œuvre, « car une vision commune est essentielle pour ancrer la prévention à tous les niveaux », et enfin les interventions ultérieures sur ouvrages, « un sujet à prendre en compte dès la conception pour la sécurité des salariés amenés à intervenir en exploitation ou en maintenance ».
Un suivi opérationnel basé sur des approches croisées
En 2024, une phase-test d’un an est alors engagée sur les chantiers de trois intercommunalités volontaires, deux pour Grenoble-Alpes Métropole, un pour Vienne Condrieu Agglomération et un pour Bièvre Isère Communauté. Elle démarre par une formation des chargés d’opération assurée par l’OPPBTP, avec l’intervention de la DDETS sur le volet réglementaire et celle de la Carsat pour la transmission de l’outil TOP.
Par la suite, à chaque visite de chantier, les chargés d’opération sont invités à remplir une grille d’évaluation des points de vigilance retenus, transmise à la Carsat et à la Capeb. Tout au long de l’opération, ils ont aussi la possibilité de solliciter l’OPPBTP et la Carsat pour échanger sur les problématiques rencontrées. Les organismes de prévention assurent également des visites de terrain qui permettent à leurs interlocuteurs de leur présenter « leur environnement, leurs difficultés et leurs réussites, leur façon de travailler avec les CSPS, avec les maîtres d’œuvre ». développe Fabienne Tournier, conseillère en prévention de l’OPPBTP. « C’est aussi l’occasion de faire le lien entre le PGC et les pièces de marché afin de questionner l’implication en amont du maître d’ouvrage ». En parallèle, le comité de pilotage composé des différents intervenants de Cap Prévention Chantiers se réunit pour faire des points d’étape à partir des remontées d’information, croisées avec les constats issus des contrôles de l'inspection du travail.
Une phase 2 à venir, axée sur la conception
Au terme de cette année, des bilans individuels sont réalisés avec les chargés d’opérations, et en juin 2025, l’ensemble des intervenants et les trois communautés de communes participantes signent une charte à la préfecture de l’Isère. « C’est une manière de formaliser les engagements de tous les opérationnels mais aussi d’intégrer la dimension politique et de rappeler les élus eux-mêmes à leurs responsabilités », souligne Christine Peylin. Une restitution de l’expérimentation est organisée pour valoriser l’opération devant d’autres collectivités locales susceptibles de participer à la phase 2 du projet. Alimentée par les retours d’expérience issus de la première phase, cette nouvelle session mettra l’accent sur la prise en compte des sujets sécurité dès le stade de la conception et la rédaction des pièces de marché.
« À terme, l’idée est de décliner l’opération auprès des donneurs d’ordre privé, jusqu’aux particuliers qui font appel à nos artisans, avec des schémas opérationnels adaptés », indique Virginie Guichard.
La démarche Cap Prévention Chantier, en associant une formation et un accompagnement, nous a permis d’approfondir nos connaissances et de pouvoir résoudre les difficultés rencontrées tout au long du chantier. Et parce que plus on intervient tôt, moins il y a de risques pour la suite, nous allons à l’avenir renforcer notre vigilance dès la rédaction des pièces écrites et en phase études avec les maîtres d’œuvre. Nous souhaitons aussi poursuivre les échanges avec d’autres chargés d’opération afin de partager nos pratiques face à des problématiques récurrentes.
Au sein de la métropole, nous avons en charge des chantiers à fort enjeu stratégique, que ce soit par leur typologie, leurs effectifs ou le nombre d’entreprises amenées à travailler ensemble.
Or en tant que maître d’ouvrage, nous avons parfois tendance trop à nous appuyer sur le CSPS pour ce qui touche à la sécurité. À ce titre, Cap Prévention Chantier nous a permis de gagner en compétence et de développer un regard complémentaire. Nous sommes aujourd’hui plus à même d’anticiper dès la phase de consultation les besoins en termes de mesures et de moyens de protection à mettre en place, et de contrôler leur bonne application sur le terrain.
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