Chez Laye Plâtrerie, une politique de prévention qui s’adapte au terrain
Sur des chantiers aux contraintes nombreuses, Laye Plâtrerie a fait le choix d’impliquer l’ensemble des compagnons.
Dernière mise à jour le : 25/07/2025
Thierry Beaurepère

- Une prévention qui s’adapte aux réalités des chantiers.
- Des investissements pour limiter les efforts de manutention.
Il n’est pas toujours facile, lorsque l’on incarne la troisième génération, de faire bouger une entreprise et changer les habitudes de travail. C’est la mission que s’est donnée Nicolas Laye. En reprenant les commandes de Laye Plâtrerie en 2023, créée par son grand-père Henri, puis dirigée par son père Patrick qu’il a accompagné durant une quinzaine d’années, il s'est fixé deux ambitions : poursuivre le développement de l’entreprise familiale, dont le chiffre d’affaires a été multiplié par huit entre 2006 et 2024, faisant d’elle l’un des leaders français de la plâtrerie, des cloisons et faux plafonds ; et renforcer la politique de prévention, qui n’a pas toujours progressé au même rythme que l’activité. Une nécessité alors que Laye Plâtrerie est engagée sur une centaine de chantiers en simultané en Rhône-Alpes, de Lyon à Annecy, et que les métiers de plaquiste, manœuvre et jointeur sont, plus que d’autres, exposés aux troubles musculo-squelettiques (TMS). « Il s’agit de s’inscrire dans la continuité pour ne pas déboussoler nos clients et salariés, avec une nouvelle manière de travailler, par petites touches : depuis la gestion plus fine des finances jusqu’à la définition d’une stratégie RSE plus affirmée, notamment pour la prévention, témoigne Nicolas Laye. Jusqu’à il y a quelques années, la sécurité était gérée de manière intuitive et informelle. Il était important de mieux formaliser notre politique pour gagner en sécurité et en efficacité. » Dès 2019, Laye Plâtrerie s’est engagée dans cette voie avec l’arrivée d’Audrey Baumela en tant qu’assistante de direction, nommée ensuite responsable RH et sécurité. Après avoir suivi, avec l’ensemble des chefs d’équipe, la formation « Prev’ Action Encadrement » de l’OPPBTP, elle est devenue l’interlocutrice des compagnons.

L'OPPBTP a réalisé un diagnostic pour Laye Plâtrerie, qui a été complété par des réunions avec les compagnons afin que chacun devienne acteur de sa propre sécurité.
Investir dans les bons matériels
Entre plannings serrés, sites exigus et coactivité avec d’autres corps de métiers, les remontées du terrain font état de conditions de travail parfois dégradées. L’entreprise va alors investir dans des matériels : camion-grue pour hisser les plaques de plâtre, chariots et lève-plaques pour les manipuler, plates-formes individuelles roulantes (PIR) pour aménager les plafonds… Avec pour difficulté de convaincre les ouvriers de les utiliser. « Il faut lutter contre l’inertie naturelle, les compagnons qui disent “on a toujours fait comme ça”. Les jeunes sont plus sensibles aux nécessaires évolutions », précise Nicolas Laye. Il faut aussi parfois faire face au manque de solutions techniques satisfaisantes. En témoigne la vingtaine d’exosquelettes achetés, dont une bonne partie reste au placard. « Les modèles d’il y a quelques années sont perçus comme une contrainte, difficiles à régler et pas toujours adaptés à des travaux dans des lieux exigus. Il faut toujours trouver le bon compromis entre prévention et efficacité. La question se pose à nouveau avec une nouvelle génération d’exosquelettes qui nous a été présentée lors d’une réunion organisée par l’OPPBTP, avec plusieurs fournisseurs et un ergonome. »
Un nouveau coup d'accélérateur
Cette politique de prévention a connu un nouveau coup d’accélérateur en 2022, lorsque Laye Plâtrerie a engagé une démarche Adapt (Aide à la démarche d’amélioration des postes de travail). Elle consiste en un diagnostic extérieur réalisé par un formateur de l’OPPBTP à partir de l’observation in situ des postes et méthodes de travail, complété par des réunions de groupes de compagnons permettant d’imaginer ensemble un plan d’action, pour que chacun soit sensibilisé et devienne acteur de sa propre sécurité. Certaines mesures actées sont simples à mettre en œuvre, comme la manipulation systématique des plaques en binôme ou la généralisation des genouillères dans les pantalons de travail, d’autres nécessitent des investissements plus lourds. Pour aller plus loin, l’entreprise a donc signé, en 2024, un contrat de prévention avec la Carsat. La caisse d’assurance retraite et de la santé au travail prendra à sa charge une partie des 50 000 à 60 000 euros d’investissements prévus par l’entreprise dans les trois ans (formations, achats et renouvellements de matériels…) pour améliorer la sécurité. D’ici là, Nicolas Laye aura à cœur de finaliser un autre projet, à savoir des séances d’éveil musculaire (étirements, mobilité articulaire…) à réaliser le matin, sur le temps de travail. Un ostéopathe sera prochainement chargé d’organiser des séances de formation, pour une mise en place avant la fin de l’année.
Profil de l’entreprise
Identité : Laye Plâtrerie
Activité : cloisons, plafonds, isolation
Création : 1972
Chiffre d’affaires : 19 millions d’euros
Lieu : Domène (Isère)
Nombre de salariés : 72
Conseillère en prévention OPPBTP : Rania Bourgeon
Site : layeplatrerie.fr
Reportage paru dans PréventionBTP n°297-Juillet-Août 2025-p. 24

Un soin particulier est apporté aux traitements et recyclages des déchets, dans le cadre d’une politique RSE affirmée.

Le bureau d’études intégré, qui modélise en 3D tous les chantiers, permet de gagner en efficacité et en sécurité.

Les plaques sont transportées sur des chariots et leur manipulation se fait systématiquement en binôme.

L’entrepôt est soigneusement organisé, pour un confort de travail amélioré.

Nacelle, camion-grue, monte-charges facilitent le levage des personnes et des charges aux étages.

L’entreprise a investi dans des plates-formes individuelles roulantes pour soulager les travaux en hauteur.
Focus
Avec son bureau intégré, à la pointe de l’innovation, l’entreprise est plus performante, renforce sa sécurité et valorise sa marque employeur.
Depuis plusieurs années, Laye Plâtrerie a investi dans son propre bureau d’études. À l’initiative de ce projet, Nicolas Laye fait le point sur les atouts pour l’entreprise de disposer d’un tel outil de travail.
Comment est né votre bureau d’études intégré ?
Le bureau d’études et l’utilisation d’un logiciel BIM (Building Information Modeling) sont nés à mon initiative, il y a sept ans. À l’époque, nous étions l’une des premières entreprises dans notre secteur à expérimenter cette technologie. Pour aboutir, nous avons travaillé avec l’entreprise BIM Cloisons, à partir du logiciel d’architecture Revit. Cela a valu à Laye Plâtrerie d’être invitée par Qualibat, qui nous a décerné la mention « Construction numérique/Processus BIM », à participer au salon BIM World, en avril dernier.
En quoi consiste la démarche BIM ?
Cette démarche consiste à modéliser en 3D un bâtiment à construire ou rénover, à partir des plans de l’architecte. Cette modélisation est ensuite partagée avec les chefs d’équipe, via leurs tablettes numériques. Elle permet aux différents intervenants de mieux planifier les tâches pour gagner en efficacité, de détecter plus facilement les risques et omissions et ainsi de diminuer les éventuels retards et surcoûts. In fine, en gagnant en efficacité, elle permet également de mieux gérer la sécurité.
Quels sont ses autres atouts ?
Quasiment tous nos chantiers sont modélisés. Romain et Brice, y travaillent à plein temps, accompagnés par une alternante. Ils ont des profils atypiques, l’un d’eux vient même de l’univers de la BD ! Ce bureau interne constitue un investissement financier conséquent, mais il contribue aussi à donner une image innovante de l’entreprise et participe à valoriser notre marque employeur pour attirer les talents.
Bilan de performance
« L’OPPBTP nous a permis d’accéder à des compétences que nous n’avions pas en interne. De plus en plus de donneurs d’ordres nous interrogent sur notre politique RSE. Demain, ce sera peut-être un argument décisif pour faire la différence et emporter de nouveaux marchés. Alors que les tensions sont importantes sur le marché du travail, c’est aussi un point important pour attirer de nouveaux talents », explique Nicolas Laye.
Cette démarche permet aux intervenants de mieux planifier les tâches pour détecter plus facilement les risques.

Entré dans l’entreprise en 2008 pour accompagner son père, Nicolas Laye (39 ans) en a pris les rênes en 2023. Après des études à l’Institut supérieur de la construction de Grenoble, il a suivi une formation en alternance à l’École supérieure des jeunes dirigeants du bâtiment. Ce parcours lui permet de faire souffler un vent nouveau sur l’entreprise, en y ajoutant une bonne dose de nouvelles technologies.
Méthodologie appliqué
● « J’ai rencontré le dirigeant de Laye Plâtrerie il y a trois ans. Il a toujours eu à cœur de faire des troubles musculo-squelettiques son cheval de bataille. L’entreprise s'est vite développée, et il fallait mieux structurer la politique de prévention », explique Rania Bourgeon, conseillère en prévention à l’OPPBTP.
● « Les remontées depuis le terrain étaient régulières et il était important d’impliquer l’ensemble des salariés. La démarche Adapt est apparue comme pertinente. Nous avons travaillé tous ensemble pour identifier les difficultés et mettre en place un plan d’action. »
● « Les premiers résultats sont tangibles, avec une diminution de l’accidentologie. La pédagogie est essentielle et doit être permanente, avec une politique de prévention qui doit être portée par les chefs d’équipe et mise en œuvre dès la préparation des chantiers. »