Investir dans l’humain booste clairement la performance, selon Yannick Allain, directeur général du label Maisons de Qualité
Le directeur général du label Maisons de Qualité évoque l’importance du bien-être au travail pour la qualité globale et la performance économique des entreprises de construction.
Dernière mise à jour le : 19/11/2025
Armelle Gegaden
En résumé :
- Le travail pour améliorer la sécurité conduit à une meilleure organisation, nourrissant la qualité globale et la performance économique de l’entreprise.
- La sécurité est un fondamental de la démarche qualité.
Interview parue dans PréventionBTP n°299 - Octobre 2025 p.38.

Maisons de Qualité est le premier label de qualité dédié à la maison individuelle en France. Son directeur général, Yannick Allain, met en lumière la corrélation forte entre la performance économique d’une entreprise et l’attention qu’elle porte à ses clients et à ses collaborateurs. Les cinquante entreprises labellisées, adeptes de ces principes, affichent une résilience supérieure en période de crise.
Comment se positionne Maisons de Qualité ?
Maisons de Qualité est un tiers de confiance de l'habitat durable au service de la qualité de vie des familles. Nous sommes nés il y a trente ans, juste après la loi de 1990 sur le contrat de construction de maisons individuelles. Une période de conflits où les associations de consommateurs géraient de nombreux litiges liés à des défauts techniques de construction. Ce problème est en partie résolu aujourd’hui, avec l’amélioration de la qualité technique des constructions. Notre savoir-faire initial fut de rassembler toutes les parties prenantes autour de la table : associations familiales, associations de consommateurs et professionnels. Ensemble, nous avons forgé un espace de dialogue constructif et créé notre charte Maisons de Qualité : un référentiel collectif privé. Vivante et collaborative, elle évolue constamment pour répondre aux attentes des consommateurs et aux nouvelles réglementations. Notre mission est de délivrer ce label pour la construction de maisons individuelles, mais également l'aménagement urbain depuis 2017 et l'habitat collectif depuis deux ans.
Maisons de Qualité est le premier label de qualité dédié à la maison individuelle en France, dites-vous.
En effet. Notre histoire a commencé en Bretagne, région attachée à ce type d'habitat individuel et réputée pour la qualité de ses artisans. Nous avons ensuite essaimé. Aujourd'hui, nous comptons cinquante adhérents répartis sur tout le territoire national, avec une présence marquée dans le Grand Ouest et en Nouvelle-Aquitaine. Nous sommes également implantés en Auvergne Rhône-Alpes et présents en Corse. Nos adhérents sont majoritairement des PME, dont la plus importante réalise 800 maisons individuelles.
Quelle est votre méthode pour améliorer la qualité globale de vos adhérents ?
Nous nous appuyons sur notre référentiel, qui porte sur cinq points majeurs : la qualité technique des constructions, la qualité de l'organisation interne, la qualité de la relation client, la qualité du management interne, la qualité sociale et environnementale. Tous les ans, nous réalisons un audit de chaque constructeur. Nous complétons ce diagnostic par des enquêtes de satisfaction clients, ainsi que par un baromètre de la qualité de vie au travail. Ces éléments sont consolidés dans un rapport de diagnostic, tableau de bord stratégique permettant de suivre l'évolution de l’entreprise année après année. Grâce à ces outils, le dirigeant peut identifier clairement ses points forts et ses points faibles. Il peut également se comparer à la moyenne des autres adhérents. Fort de cette analyse, chaque constructeur élabore ensuite son propre plan d'amélioration continue annuel. En tant qu'organisme certifié Qualiopi, nous les accompagnons avec des formations.
Comment mesurez-vousle bien-être au travail ?
Chaque année, nous soumettons un questionnaire anonyme de quarante questions à chaque collaborateur. Nous y mesurons les aspects fondamentaux de la vie au travail : la clarté des missions et l'adéquation des compétences associées, l'adaptation des postes de travail, la valorisation des efforts, le ressenti au sein des équipes, ainsi que les horaires, la rémunération et les formations. Nous interrogeons également les employés sur leur volonté de recommander leur propre entreprise. Nous obtenons généralement d'excellents scores. Nous complétons ce dispositif par des entretiens individuels avec les collaborateurs, afin de mieux cerner le type de management en place. Nous le vérifions au quotidien : la qualité globale est intrinsèquement liée à celle du management.
Au fil des années, vous dressez un constat intéressant…
Grâce à l'accès aux bilans, comptes de résultat, contrats, enquêtes de satisfaction et baromètres internes, nous disposons d'une connaissance quasi exhaustive de la performance de chaque adhérent. Ces données permettent de dégager une corrélation claire : les dirigeants qui priorisent le bien-être et la formation de leurs équipes sont invariablement les plus performants, tant sur le plan technique qu'économique. Cette approche se traduit par une plus forte résilience en période de crise : nos adhérents ont enregistré une baisse d'activité de seulement 18 %, contre 36 % pour la moyenne nationale. L'organisation, le management et la formation constituent désormais les principaux leviers de différenciation d’une entreprise. Si l'innovation produit conserve son importance, son impact sur la performance s'avère moindre. Il faut encourager les entreprises à s’engager dans des démarches structurées d'amélioration continue !
Comment analysez-vous la perception des clients ?
Maisons de Qualité analyse la perception client à travers des enquêtes de satisfaction menées à deux moments clés du parcours : deux mois après la signature du contrat de construction, et cinq mois après la livraison du logement. Ces enquêtes explorent l'intégralité de la relation client, depuis les interactions avec le constructeur jusqu'aux échanges avec les conducteurs de travaux et les artisans. Les clients sont interrogés sur leur satisfaction, ce qu'ils ont apprécié, et les points moins satisfaisants. Ce retour d'expérience s'avère précieux. Après trois ans d'adhésion, les constructeurs labellisés développent une compréhension intuitive des attentes de leurs clients, leur permettant d'anticiper les éventuels points de friction. Le résultat est éloquent : près de neuf clients sur dix recommanderaient leur constructeur à leur entourage. Pour rejoindre le label Maisons de Qualité, un constructeur doit d'ailleurs attester d'un taux de recommandation initial d'au moins 70 %.
Que révèlent ces enquêtes sur les questions de santé, sécurité et environnement ?
Ce qui ressort le plus fréquemment, c'est la propreté du chantier, qui est une attente forte des clients. Si nos niveaux de propreté sont déjà élevés, des améliorations sont possibles. Nous nous battons activement sur ce sujet. Il ne s'agit pas seulement de la propreté de la maison à la livraison, mais bien de l'état du chantier pendant toute la durée des travaux. Cela inclut la question de l'approvisionnement des matériaux et la délimitation de zones spécifiques. Nous avons beaucoup insisté auprès de nos
adhérents pour qu'ils fassent appel à des entreprises extérieures spécialisées dans le tri, la collecte et le recyclage des déchets. Les principales difficultés ne sont pas forcément financières, car les constructeurs sont souvent prêts à prendre en charge ces coûts. Le frein réside plutôt dans la discipline sur le chantier pour éviter les tas de déchets ou les gravats qui traînent. Cela implique un travail de pédagogie des donneurs d'ordre auprès des artisans sous-traitants. C’est un sujet important, car un chantier propre et bien organisé réduit les risques d'accidents et contribue au bien-être général.
Autre sujet d’hygiène, celui des bases vie sur les chantiers diffus…
Certains constructeurs ont investi dans des bases vie, mais tous n’arrivent pas à équiper chaque chantier d’une base vie transportable. La problématique des toilettes, par exemple, est particulièrement complexe à résoudre en diffus. La difficulté réside notamment dans le coût et la question de savoir qui doit le supporter. Mais il existe aussi des aides financières. Nous avons entrepris un travail sur ce point avec l’OPPBTP pour informer nos adhérents et, plus largement, stimuler des coopérations de terrain pour mettre en place des plans d'hygiène et de sécurité.
Quel est votre état d’esprit sur la santé et sécurité ?
Nos adhérents cherchent des repères clairs, des outils et des partenariats pour déployer les meilleures pratiques. Pour nous, la sécurité est un fondamental de la démarche qualité. Nous appliquons la « symétrie des attentions » : l'attention portée au client doit être la même envers les collaborateurs et les artisans. Améliorer la sécurité sur les chantiers force à anticiper, à mieux s’organiser, ce qui nourrit la qualité globale d’une organisation. Nos adhérents sont globalement bien avancés en matière de santé, sécurité, environnement. Leur choix d'être audités sur toutes les facettes de leur entreprise témoigne d'une démarche proactive de transparence et d'un engagement à dépasser les standards et les réglementations, ce qui inclut évidemment ces sujets.