260_Grand entretien_François Teste du Bailler

    ©Photothèque GCC

    En résumé
    • La culture santé sécurité a été amorcée il y a cinq ans, et accélérée depuis 2018.
    • GCC aborde des actions de prévention sur l'aménagement des postes, l'ergonomie du matériel ou l'amélioration des conditions de travail.

    Article paru dans le magazine Prévention BTP n°260 de mars 2022, pages 34-37.

    Depuis son arrivée au sein de GCC, en 2018, François Teste du Bailler s'appuie sur le modèle décentralisé du groupe pour développer, avec les préventeurs, une culture de prévention santé sécurité que, chacun, du comité exécutif à l'ensemble des collaborateurs, en passant par les intérimaires et les sous-traitants, intègre pleinement.

    Comment votre groupe a-t-il traversé ces deux dernières années marquées par une crise sanitaire, sociale et économique ?

    Nous avons traversé cette période au mieux, en respectant les règles et les consignes sanitaires. C'était d'autant plus un enjeu important que nous sommes un groupe décentralisé. Sur les 2 579 collaborateurs, nous n'avons relevé aucun cas grave. Nous tirons une grande fierté d'avoir entretenu un excellent climat social lié à notre modèle organisé en agences/filiales, et avec des CSE décentralisés. Nos circuits courts, au plus près du terrain et proches des clients, et la prise de conscience de la responsabilité de chacun ont permis de maintenir un fonctionnement optimal. Les modalités de la reprise, dès mars et avril 2020, ont été définies au plus haut niveau de la direction, ce qui, dans un modèle décentralisé, a apporté du sens et des solutions concrètes. Économiquement, nous avons mobilisé toutes les agences et filiales sur le développement commercial à la sortie du premier confinement : cela a plutôt bien fonctionné avec de beaux succès, et a eu pour effet de renforcer le carnet de commandes de nos trois pôles (Construction, énergie et promotion immobilière) en pleine pandémie.

    Avec 48 agences et filiales et près de 2 600 collaborateurs, que signifie concrètement « développer une culture prévention sécurité » ?

    Ce n'est pas facile, mais cela fonctionne ! La thématique de la culture sécurité a été amorcée il y a cinq ans au niveau du groupe, et accélérée depuis 2018. Pour impulser une vraie politique de prévention à l'échelle de GCC, pour passer d'une démarche de culture calculative à une culture proactive, celle-ci devait être d'abord appropriée par le sommet, avec une exigence d'exemplarité. Le management de la prévention commence par là. Cette démarche demande du temps, un temps nécessaire pour entraîner le plus grand nombre. En matière de prévention, la cohérence est primordiale et nous avons mis les moyens, notamment en étoffant nos équipes de préventeurs, passées de 5 à 15 personnes. Dans la mesure où GCC ne veut pas se caractériser seulement par des règles, des procédures ou des sanctions, le sens donné à la politique a permis aux collaborateurs de se l'approprier en conscience. La prévention part d'un principe simple : progresser ne dépend que de nous. C'est dans ce contexte qu'a été élaborée l'opération : « Et si votre enfant venait sur le chantier ? ». Nous avons axé la prévention sur l'humain, avec de l'émotion mais sans pathos. Il s'agissait de montrer aux salariés et à leurs familles que chacun a un rôle, et porte une responsabilité en matière de santé. Le Film « La prévention, un état d'esprit », a été primé au festival Fimbacte, en 2019, puis a reçu le Dauphin d'Argent lors des 11es Cannes Corporate & TV Awards 2020. Ce film est très utilisé, notamment au sein d'un module de formation prévention appelé « État d'esprit », présenté à chaque nouveau salarié, soit huit sessions de douze personnes chacune en 2021.

    Comment liez-vous la politique de prévention santé-sécurité avec votre démarche RSE ?

    L'enjeu de la démarche RSE n'est pas d'ajouter une couche de plus, mais d'avoir un fonctionnement intégré avec les engagements – les cercles vertueux – QPE. Le premier enjeu RSE est ainsi celui de la « santé et la sécurité dans nos activités ». En moins de deux ans, nous avons intégré la politique de prévention santé-sécurité dans les démarches RSE, QSE, ou encore comme engagement extra-financier. Je ne connais pas une entité du groupe où la santé et la sécurité soit considérée différemment de l'ambition de départ. Parmi les principaux indicateurs de pilotage, le taux de fréquence a été divisé par trois en cinq ans et par deux en deux ans. Sur le périmètre France, nous pouvons maintenant mieux aborder les sujets organisationnels et humains de fond, comme les TMS, les RPS et les maladies professionnelles. Avec un taux de fréquence de dix, plus conforme à nos ambitions, nous travaillons avec la Cramif et l'OPPBTP sur des sujets qui vont au-delà des seules règles, en abordant, par exemple, des actions de prévention sur l'aménagement des postes, l'ergonomie du matériel ou l'amélioration des conditions de travail, comme à Cannes avec des bétons sans vibration. Enfin, avec les services RH et de prévention, nous gérons l'inaptitude des collaborateurs par la mise en place de solutions alternatives.

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    Lorsque l'on dispose d'un modèle d'organisation agile et responsabilisé, chaque agence s'approprie vite les savoir-faire.

    François Teste du Bailler

    Par quels moyens et pour quels résultats impliquez-vous les sous-traitants et intérimaires dans vos actions de prévention ?

    Nous faisons naturellement appel à des intérimaires pour des besoins ponctuels en les intégrant sur nos sites de production. Il est impensable d'effectuer des différences avec nos salariés ! Nous devons être très attentifs à l'accidentologie des intérimaires avec, au minimum, un accueil et une formation aux principaux enjeux de prévention sur les chantiers. Nous menons des plans d'action pour ces salariés en appoint de nos équipes, et il reste encore des points de progrès à franchir. Quant aux sous-traitants, nous menons des plans d'action depuis deux ans pour les aider à intégrer nos standards, et mieux les associer. Chaque année, nous organisons une semaine de prévention pendant laquelle les sous-traitants sont impliqués.

    Portrait chinois

    Le mot que vous détestez? Groupe de travail.

    Le métier que vous auriez aimé exercer en dehors du vôtre? Pianiste.

    Le métier que vous n'auriez pas aimé faire? Banquier.

    Votre bâtiment préféré? L'aile Richelieu du Louvre (trois ans de ma vie professionnelle en 1990…).

    Le son, le bruit que vous aimez? Le piano, les vagues.

    Le son, le bruit que vous détestez? Les pleurs.

    Le livre que vous emporteriez sur une île déserte? L'encyclopédie.

    Une personnalité pour illustrer un nouveau billet de banque? Marie Curie.

    En quoi l'innovation numérique peut-elle contribuer à améliorer la santé-sécurité des collaborateurs ?

    Nos préventeurs sont à la manœuvre d'une démarche menée depuis deux à trois ans en matière de chasse aux risques. GCC a fait le choix de ne pas mener une transformation digitale, mais plutôt d'intégrer, au fil des innovations, l'apport du digital dans les métiers, depuis la comptabilité jusqu'aux chantiers. C'est par exemple le cas de notre application maison Kizeo Forms, qui permet de passer des comptes rendus papier à la gestion automatique et numérique des données. Un ingénieur prévention « geek » a même créé de toutes pièces un PPSPS digital qui accélère et fiabilise la donnée pour l'ensemble du Pôle Construction. Primée au concours Prévention Santé Sécurité d'EGF-BTP, cette innovation digitale est appliquée sur nos deux cents chantiers récurrents. Une autre application, interactive, a été également primée par EGF-BTP. Conçue par l'un de nos collaborateurs, ancien maître compagnon, elle propose une solution digitale pour former, à partir de tutoriels, pour le plus grand nombre par thématique (grues, passerelles…).

    Quel est l'enjeu de standardiser la signalisation et la matérialisation des circulations sur les chantiers ?

    Les accidents de plain-pied étaient encore trop nombreux dans le secteur du BTP. Si les espaces de circulation sont mal tenus, les accidents peuvent être très graves. Face à ce constat connu dans la profession, GCC a standardisé depuis trois ans la matérialisation des circulations afin de disposer d'espaces plus aérés et mieux nettoyés sur les chantiers.

    260_Grand Entretien_François Teste du Bailler François Teste du Bailler

    Comment adapter la politique de santé et sécurité aux évolutions du groupe et du secteur du BTP ?

    Nous sommes engagés dans une démarche qui n'est pas achevée. Notre démarche reste basée sur l'engagement et la confiance, nous poursuivrons avec abnégation cette politique de prévention. Peut-être aurons-nous demain d'autres activités avec l'émergence de nouveaux risques auxquels il conviendra de répondre. C'est la raison pour laquelle notre force de frappe QPE est en veille permanente sur les risques et communique régulièrement avec le Comex. Dans les métiers de la construction et de l'énergie, la gestion de la prévention constitue un sujet d'attractivité à prendre très au sérieux et à porter avec une grande ambition. Elle sera, et j'y englobe la RSE, un enjeu vital dans le monde de demain. Les systèmes constructifs vont probablement évoluer à une vitesse incroyable. Mais lorsque l'on dispose d'un modèle d'organisation agile et responsabilisé, comme le promeut GCC, chaque agence s'approprie vite les savoir-faire. Et, confrontée aux nouveaux enjeux spécifiques de prévention, elle sera mieux armée pour les solutionner. Au service de son capital humain.

    PARCOURS

    François Teste du Bailler est ingénieur, diplômé de Polytech'Lille.

    De 1987 à 2011 : au sein de Bouygues Construction : ingénieur travaux et chef de service Île-de-France, puis directeur d'exploitation en Alsace, avant de devenir directeur projet, directeur Grand Lyon, puis directeur général adjoint et directeur général délégué de GFC Construction.

    De 2011 à 2018 : au sein de Vinci Construction France : directeur délégué Rhône-Alpes Sud, puis directeur délégué Bâtiment Rhône-Alpes et directeur opérationnel Centre-Est.

    De 2018 à 2021 : directeur général du pôle Construction de GCC.

    En novembre 2021 : il est nommé directeur général du Groupe GCC.

    GCC

    Reprise par ses cadres dirigeants et ses salariés, GCC devient indépendant en 2000. Le groupe est organisé en trois pôles.

    Le pôle Construction réalise des ouvrages sur-mesure, publics ou privés, neufs ou rénovés, et développe ses compétences sur les montages d'opérations traditionnelles, sur les projets en co-promotion, et sur le développement d'opérations de type contrats de partenariat. 

    Son pôle Énergie (depuis 2012) est axé autour du Génie Thermique et du Génie Électrique avec quatre segments d'activités stratégiques : Data management, infrastructure de transport, industrie et solutions tertiaires. 

    En 2017, GCC se dote d'un pôle Promotion Immobilière en rachetant le promoteur Edelis. 

    Organisé en 48 agences et filiales, le groupe GCC compte près de 2 600 collaborateurs. Il a réalisé en 2020 un CA de 904 millions d'euros répartis à 65 % par le pôle Construction, 20 % par le pôle Promotion immobilière et 15 % par le pôle Énergie.

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