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Jurisprudence

Infractions au Code du travail et poursuite pénale

En cas de non-respect de l’employeur à ses obligations en matière de santé et de sécurité au travail, le ministère public peut engager lui-même des poursuites à son encontre, même en l’absence de procès-verbal de l’Inspection du travail.

Dernière mise à jour le : 20/05/2025

Que s’est-il passé ?

Arrêt de la Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 mai 2025, n°24-82.660

Une salariée est victime d’un accident du travail alors qu’elle travaillait sur une machine qui lui a happé la main et l’a grièvement blessée. À la suite de cet accident, l’Inspection du travail demande à l’entreprise de faire vérifier la conformité de la machine par un organisme accrédité.

À la suite du rapport de vérification, l’Inspection du travail constate la non-conformité de l’équipement de travail à l’origine de l’accident. Elle signale alors les faits au procureur de la République, en application de l’article 40 du Code de procédure pénale. Selon cet article, l’Inspection du travail est tenue de signaler au procureur de la République les crimes et les délits dont elle a connaissance et de lui transmettre tous les renseignements qui y sont relatifs.

Informé des faits, le parquet engage des poursuites pénales contre l’entreprise pour « blessures involontaires et mise à disposition de travailleur d’équipement de travail ne permettant pas de préserver sa sécurité. »

L’entreprise conteste ces poursuites au motif que l’Inspection du travail ne pouvait pas appliquer l’article 40 précité pour une infraction au droit du travail. Selon elle, cette infraction ne pouvait être portée à la connaissance du procureur de la République uniquement sur la base d’un procès-verbal, or l’Inspection du travail n’en avait pas dressé. Sans procès-verbal, l’entreprise considère qu’elle n’a pas pu faire connaître ses observations à l’Inspection du travail avant la saisine du procureur de la République.

La cour d’appel de Colmar retient la responsabilité pénale de l’entreprise et la condamne à 3 000 euros d’amende pour infraction à la réglementation sur l’hygiène et la sécurité des travailleurs.

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel et considère la procédure et les poursuites valables.

Pourquoi cette décision ?

Selon la Cour de cassation, aucune disposition réglementaire n’impose qu'une poursuite en matière d'infractions au Code du travail doive être nécessairement exercée sur la base d'un procès-verbal de l'Inspection du travail. Le ministère public, informé des faits, peut engager lui-même une telle poursuite.

Elle précise également que ni l’absence d’information préalable de l’employeur ni l’impossibilité pour lui de faire connaître à l'Inspection du travail ses observations, avant la saisine du procureur de la République, ne rendent nulles les poursuites. À ce titre, les juges soulignent que l’employeur a pu faire valoir ses observations auprès du procureur de la République lors de l’enquête préliminaire.

Commentaire ?

Cet arrêt met en avant la coexistence des deux régimes de signalement de l’Inspection du travail en cas d’infraction au Code du travail :

  • Le régime applicable aux infractions du Code du travail prévu à l’article L8113-7 du Code du travail : les agents de contrôle de l’Inspection du travail constatent les infractions au Code du travail au moyen de procès-verbaux, lesquels sont ensuite transmis au procureur de la République. Avant cette transmission, l’agent de contrôle informe la personne visée au procès-verbal des faits susceptibles de constituer une infraction pénale ainsi que des sanctions encourues.

  • Le régime applicable aux infractions pénales (y compris les infractions pénales au Code du travail) prévu à l’article 40 du Code de procédure pénale : l’Inspection du travail est tenue de signaler au procureur de la République les délits et crimes dont elle a connaissance. Le ministère public peut alors engager des poursuites pénales contre l’entreprise, même sans procès-verbal de l’Inspection du travail.