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Calfeutrement de trémie : prévention des TMS
Dernière mise à jour le : 11/06/2025
Le calfeutrement de réservations ou de trémies est une tâche de finition réalisée par les maçons finisseurs après le passage des réseaux des lots techniques. Sa mise en œuvre est souvent complexe car elle se heurte à des problématiques de coactivité avec les autres corps d’état du chantier, ainsi que d’accessibilité qui engendrent notamment des risques liés aux postures de travail et aux manutentions manuelles. Souvent sous-estimés, ces risques doivent être bien identifiés en amont afin de limiter leurs impacts sur la santé et la sécurité au travail.
Cette solution présente les principaux résultats d'une étude ergonomique * menée sur des chantiers, dans le cadre du dispositif Fipu (Fonds d'investissement pour la prévention de l'usure professionnelle) financé par la Cnam. L'étude a été analysée par les experts de la direction technique de l'OPPBTP pour identifier les situations de travail à risque de troubles musculosquelettiques (TMS) dans l'objectif de proposer des solutions pour améliorer les conditions de travail, réduire voire éliminer les TMS. Pour en savoir plus sur le dispositif Fipu, ses aides financières et les équipements subventionnés, consultez notre boîte à outils TMS/Fipu.
* cabinet Ergonalliance

Sommaire
En quoi consiste le calfeutrement d’une trémie ?
Le calfeutrement de réservation ou de trémie consiste à restituer l'intégrité coupe-feu ou pare-flamme au droit du passage de chemin de câbles, de conduits, de canalisations, de tuyaux, etc., ou encore de gaines de ventilation, dans les murs, les planchers et les plafonds, pour empêcher le bruit, les flammes, la chaleur ou la fumée de se propager rapidement d'un compartiment à un autre.
Le calfeutrement des trémies s’effectue lors de la construction d’un bâtiment neuf ou sur un chantier de rénovation. Cette tâche est généralement réalisée à la fin des travaux de gros œuvre et après la mise en place, par certains corps d’état technique (CET), des réseaux électriques (courant fort, courant faible), du chauffage, de la climatisation, de la ventilation, de la plomberie…
On distingue plusieurs phases pour obturer une trémie, dont la conception du coffrage et le rebouchage des espaces entre les réseaux.
Pour éviter les fuites de béton lors du remplissage des réservations, les compagnons bouchent les vides situés autour des réseaux. En fonction des produits à disposition, ils utilisent :
- du plâtre mélangé avec de la filasse,
- de la mousse expansive,
- des fragments de sac de ciment.
Il existe différentes techniques de calfeutrement définies selon le document technique unifié (DTU) et le cahier des clauses techniques particulières (CCTP).
Le coulage de béton est généralement réalisé au seau compte tenu de la faible quantité de béton nécessaire.
La réalisation d'un coffrage à l’aide d’étais
Lorsque le coffrage est maintenu par un ou plusieurs étais, les matériaux utilisés peuvent différer en fonction de la surface à obstruer et de leur disponibilité. Les compagnons peuvent utiliser des bastaings, du polystyrène extrudé ou du contreplaqué. Des poutrelles type « Doka » peuvent venir soutenir le coffrage.
Conception du coffrage à l'aide d'étai
La réalisation du coffrage sans étai ou la technique dite à fond perdu
Cette technique est plutôt utilisée sur les chantiers de réhabilitation dont les planchers sont en partie constitués de solives (bois).
Le compagnon cale des chevrons ou du grillage, type Nergalto, sur les solives, sur lesquelles viennent s’appuyer une ou plusieurs planches de contreplaqué. On appelle cette technique à « fond perdu » ou « bois perdu », car les matériaux de construction ne sont pas récupérés.
Technique de coffrage dite à fond perdu
Quels sont les facteurs de risques de TMS liés aux techniques de calfeutrement ?
Risques liés aux postures de travail
Travail à genoux et bras en extension
Le rebouchage d’une réservation, à l’aide d’un fond de coffrage bois en sous-face du plancher, se réalise par le dessous et par le dessus. De ce fait, lors de la réalisation du coffrage, du ferraillage, du bétonnage et du lissage du béton, les compagnons sont exposés à des postures à risque au niveau des genoux, des épaules (bras au-dessus de 90°) et du dos.
La durée d’exposition dépend de la technique choisie pour le coffrage (fond perdu ou avec étai), mais aussi du matériel et des matériaux à disposition. Pour la conception d’un coffrage en bois perdu, le compagnon peut rester pendant une heure à genou sans se relever.
Rebouchage d'une réservation par le dessous
Rebouchage d'une réservation par le dessus
Lors du rebouchage des petits orifices, la durée d’exposition au facteur de risques de TMS (bras en extension) diffère en fonction de la technique utilisée. En effet, un opérateur passe un temps plus important pour étaler du plâtre et de la filasse que pour mettre de la mousse expansive.
Rebouchage des petits orifices
Risques liés aux manutentions manuelles de charge
Acheminement des matériaux
L’acheminement du matériel entre la zone de stockage et la trémie s’effectue en le portant sur l’épaule.
Acheminement de matériel
Déplacement et effort physique
Les compagnons sont amenés à fabriquer et à transporter du béton. Les phases d’approvisionnement du matériel (étaiement, bastaings…), de matériaux (bois de coffrage, seaux de béton...) et des équipements nécessaires pour effectuer cette tâche impliquent de déplacer de fortes charges sur différents niveaux d’un même bâtiment.
Ces tâches étant souvent réalisées en fin du gros œuvre, les équipements de manutention mécanique (grue, monte-charge...) peuvent ne plus être disponibles, occasionnant des ports de charges manuelles récurrents ainsi que des déplacements fréquents entre les différents niveaux. De plus, le port de charges ponctuelles, notamment sur les épaules (port d’étais...), implique également des points de pression pouvant être à l’origine de TMS.
Exemple sur un chantier de rénovation
Le béton est souvent réalisé à l'aide d'une bétonnière sur site. Puis, il est transporté à l'aide de seaux dans le bâtiment (les seaux pèsent 15 kg) sur le chantier.
Dans l’exemple de ce chantier, les compagnons doivent monter au 1er étage en portant deux seaux, ce qui représente l’équivalent de 16 allers-retours.
Fabrication et transport de béton
Exemple sur un chantier de construction de bâtiment
Lorsqu'il n’y a pas de bétonnière à disposition, les compagnons gâchent le béton manuellement, à même le sol ou dans des bacs spécifiques. Dans ce cas précis, le volume de béton préparé peut représenter environ 2 brouettes de sable + 1 brouette de gravier + 2 sacs de ciment et de l’eau, soit 15 seaux de béton d’environ 15 kg.
Sur ce chantier, les compagnons ont transporté les seaux jusqu’au 5e étage (95 marches).
Les compagnons présentent un essoufflement après un ou plusieurs allers-retours, et l’échelle de Borg a permis de mesurer la perception de l’effort, entre « dur » et « épuisant ».
Fabrication manuelle et transport de béton
Risques liés à la coactivité
De manière générale, le rebouchage des trémies est réalisé par « campagne » (soit par niveau, soit par colonne montante) par le lot gros œuvre. Une coactivité avec d'autres entreprises intervenant sur les plateaux de travail peut donc avoir lieu et occasionner des difficultés d’accessibilité au poste de travail pour effectuer le rebouchage des trémies. Cette difficulté d'accès génère des postures contraignantes et l’utilisation d’équipements non adaptés par manque d’espace suffisant.
Exemple lié à la réalisation d'un coffrage rendue difficile par l’exiguïté de l’accès à la trémie
Sur l’exemple ci-dessous issu de l'étude ergonomique, nous observons que les rails réduisent l’espace de travail et ne permettent pas au compagnon d’utiliser la PIRL. Le compagnon est donc obligé d’adopter des postures contraignantes au niveau du dos (torsion de la colonne vertébrale) ou d’utiliser du matériel l’obligeant à se mettre en insécurité.
Exiguïté de l'accès à la trémie
Exemple d'un chantier de rénovation
Le matériel déposé par un corps d’état du second œuvre ne permet pas d'accéder à une trémie à reboucher.
Accès à la trémie rendu difficile
Autre risque identifié
Le risque de chute de hauteur
Les interventions, réalisées notamment depuis le plancher bas, peuvent provoquer des risques de chutes de hauteur. En effet, les équipements de protection contre les chutes (garde-corps, obturation) peuvent dans certains cas gêner les travaux et entraîner leur dépose.
De plus, au droit de réseaux de taille conséquente (gaines de climatisation), lorsque la partie supérieure du réseau ne dépasse pas suffisamment (hauteur > 1 mètre) de la dalle béton, l’opérateur peut chuter à l’intérieur de celui-ci.
Enfin, lorsque les réservations dans le plancher sont beaucoup plus larges que la taille du réseau lui-même, il existe un risque de chute dans l’espace laissé vide.
Gaine de climatisation
Préconisations
Préconisations liées à l’organisation du travail
- En phase de conception du bâtiment, la mise en œuvre de réservations par famille de réseaux doit être encouragée plutôt que la réalisation d’une trémie générale.
Cette étape doit permettre de limiter, voire de supprimer les risques de chute des opérateurs, en concevant plusieurs conduits de tailles réduites plutôt qu’une grande trémie. Cette conception permet également aux entreprises de disposer d’une surface de travail plus sécurisée (car intégrée à l’ouvrage) pour la pose des conduits et d’avoir des dispositifs de protections adaptés et indépendants. De plus, la création de réservations légèrement supérieures à la dimension des réseaux permet de limiter le volume de matière à mobiliser (béton, bois de coffrage, étaiement) lors du calfeutrement et de privilégier l’usage de mousses polyuréthane plutôt que du béton. - Pour assurer l’optimisation et l’harmonisation spatiale des réseaux, la maîtrise d'ouvrage (MOA) doit pouvoir nommer les entreprises suffisamment en amont pour que le maître d'œuvre (MOE) puisse coordonner la synthèse entre les différents lots techniques avant la réalisation du gros œuvre.
- Pour éviter les risques de coactivité, identifier clairement le lot responsable des calfeutrements des trémies en amont et renseigner précisément le planning détaillé de l’opération de l’ordonnancement du calfeutrement par niveau ou par zone de chantier.
- Industrialiser au mieux cette phase de travaux. Réaliser l’évaluation des risques en y associant les outils ou équipements nécessaires à cette tâche. Cette demande pourrait être précisée dans les CCTP de tous les lots et complétée par une évaluation dans les PPSPS.
- Dans la mesure du possible, planifier le matin les tâches présentant des contraintes physiques importantes (comme la fabrication du coffrage et l’approvisionnement du béton).
- Répartir la charge de travail (approvisionnement du béton) sur plusieurs compagnons ou utiliser des équipements spécifiques.
Préconisations liées à la technique
- Pour limiter le temps d’exposition avec les bras en extension, il est nécessaire de privilégier les techniques comme l’utilisation de la mousse expansive (quand il y a du calfeutrement avec des fourreaux).
- Privilégier l’emploi de boîtes de coffrage implantées dans les dalles béton et éviter la réalisation a posteriori d’un coffrage.
- Mettre à disposition des moyens de manutention mécanisés tels que grue, monte-charge, mise en service anticipée d’ascenseur, etc., tout au long des travaux nécessitant des transports verticaux de charges. Le MOA pourrait indiquer systématiquement, dans le CCTP du lot « gros œuvre », la possibilité de conserver la grue au-delà de la fin du gros œuvre (par exemple sur une durée d’un mois) et, dans le CCTP du lot « ascenseur », les modalités d’un usage anticipé, c’est-à-dire avant la livraison d’un ou plusieurs ascenseurs.
Préconisations liées aux équipements de protection individuelle
- Pour limiter le risque de lésions au niveau des genoux (problème de ménisque, hygroma du genou ; consulter les tableaux 57 et 79 des maladies professionnelles), il est nécessaire de mettre à disposition soit des protections pour les genoux directement intégrées dans les vêtements de travail, soit des genouillères amovibles.
- Pour limiter le risque de lésions au niveau des épaules (acheminement du matériel (étais, bastaings, morceaux de contreplaqué entre la zone de stockage et la trémie), il est nécessaire d’équiper les vêtements de travail de mousse de protection.
- Des essais avec les fournisseurs peuvent être effectués auprès des compagnons afin de sélectionner les protections les plus adaptées (activité, confort, praticité) et les intégrer ensuite dans un package ou au sein d’un catalogue.
Certaines photos peuvent montrer des écarts aux règles habituelles de sécurité : elles reflètent la réalité des chantiers observés. Leur but n’est pas de montrer un exemple parfait, mais de représenter des situations réelles sur le terrain.
Réglementation
Les plans de travail sur lesquels interviennent les artisans et les compagnons doivent être équipés d’une protection collective : garde-corps de 1 à 1,10 mètre, rigides, intégrés ou fixés de manière sûre, plinthe de butée de 10 à 15 cm, main courante… ou par tout autre moyen tout aussi efficace (article R4323-59 du Code du travail).