Collaborateurs sur un chantier

    Réforme de la santé au travail, acte II. Suite à la publication du rapport Lecocq en 2018 qui propose un véritable « big bang » de la santé au travail, le Sénat a souhaité prendre part au débat. Dans ce cadre, la commission des affaires sociales du Sénat a chargé deux sénateurs, Pascale Gruny et Stéphane Artano, d’identifier des pistes d'amélioration de la prévention des risques professionnels. L’objectif ? Mettre en place « un service universel de qualité sur l'ensemble du territoire pour tous les travailleurs, quel que soit leur statut. »

    Les deux sénateurs ont donc formulé une série de propositions dans un rapport rendu public le 3 octobre dernier. En voici les principales :

    Création d’une agence nationale de santé

    Axe majeur du rapport du Sénat : la gouvernance de la santé au travail au niveau national. Les sénateurs plaident pour la création d’une agence nationale de santé au travail qui naîtrait de la fusion de l’Anact, de l’INRS et d’Eurogip¹. Cette nouvelle entité aurait notamment la mission d’harmoniser les pratiques des services de santé au travail (SST) via un référentiel de certification, établi en lien avec l’Anses, Santé publique France et la Haute autorité de santé (HAS).

    Fusion des Carsat et des Aract

    Là où le rapport Lecocq préconisait la création d’un guichet unique au niveau régional, les sénateurs proposent un rassemblement des Carsat et des Aract au sein de caisses régionales de la santé au travail afin d’en faire des relais de terrain de l’agence nationale de la santé au travail dans le conseil et l’accompagnement des SST. Ces entités locales auraient comme mission de « faciliter la diffusion d’outils de prévention adaptés au contexte de sinistralité propre à l’entreprise ». Pour justifier ce rapprochement, les sénateurs mettent en avant une meilleure prise en compte des nouveaux risques professionnels associés aux enjeux d’organisation du travail, « enjeux que les Carsat ne prennent que très marginalement en charge car elles se concentrent prioritairement sur la prévention de risques physiques ou chimiques », estiment les rapporteurs.

    Maintien de la mission de l’OPPBTP

    Le rapport du Sénat n’envisage en revanche pas, au contraire du rapport Lecocq, une remise en cause de l’organisation et du fonctionnement de l’OPPBTP dans le nouveau schéma de gouvernance envisagé. « Cet organisme de prévention national a démontré l’intérêt d’une démarche pragmatique et collective de prévention au niveau d’une branche professionnelle fortement exposée aux risques professionnels », estiment les rapporteurs, qui préconisent par ailleurs que ce modèle soit « répliqué à d’autres branches professionnelles marquées par un contexte de sinistralité particulier. » Le rapport prévoit qu’à l’instar des SST, l’OPPBTP et son réseau d’agences régionales fassent l’objet d’une certification périodique.

    Pas de cotisation unique

    Le rapport se prononce par ailleurs contre une fusion des cotisations de la sécurité sociale et des cotisations au service de santé au travail. Les premières s’inscrivant « dans une logique d’assurance et donc essentiellement de réparation ». Néanmoins, les sénateurs proposent de permettre aux SSTI de fixer leurs cotisations en tenant compte d’autres critères que le seul nombre de salariés. Pour rappel, sur le volet financement de la santé au travail, le rapport Lecocq prévoyait l’instauration d’une cotisation unique pour les employeurs.

    Risque chimique : un suivi plus rigoureux des expositions

    Sur la question spécifique des risques chimiques, le rapport du Sénat renvoie aux conclusions du Rapport Frimat ² qui plaident pour un suivi simplifié mais plus rigoureux des expositions aux agents chimiques dangereux. Il est notamment proposé de simplifier la réglementation en contrepartie d’un renforcement des sanctions et d’améliorer le suivi des salariés par la création d’un dossier d’entreprise compilant les différentes informations disponibles.

    Renforcer la prévention des RPS et l’amélioration des conditions de travail

    « La prise en charge des risques psychosociaux (RPS) est particulièrement délicate dès lors que leur émergence se trouve au confluent de la vie professionnelle et de la vie personnelle. La difficulté à établir clairement le lien entre une pathologie psychique et l'activité professionnelle a conduit, jusqu'à cette date, à écarter la mise en place d'un tableau de maladies professionnelles spécifique aux RPS », note le rapport. Pour améliorer la prévention des RPS, ce dernier formule une série de cinq propositions dont une incitative prévoyant l’instauration d’une ristourne sur le taux de cotisation AT-MP aux entreprises ayant formé au moins 50 % de leur effectif à la prévention et à la gestion des RPS. Les SST seraient également chargés de conduire une évaluation triennale de la qualité de vie au travail dans chaque entreprise adhérente.

    Lutter contre la désinsertion professionnelle

    Enfin, les sénateurs préconisent de mettre l’accent sur la prévention de la désinsertion professionnelle en identifiant notamment, de manière précoce, les causes d’arrêt de travail. Pour ce faire, il pourrait être demandé à la Cnam de « fournir à chaque entreprise les données relatives à l’absentéisme de ses salariés pour raison de santé en comparaison avec les autres entreprises de sa branche ». Le rapport propose également de mieux coordonner les acteurs intervenant autour du travailleur en associant par exemple le médecin du travail à l’élaboration du protocole de soins favorisant le retour au travail.


    1. Eurogip est un groupement d’intérêt public (GIP) entre la Cnam et l’INRS.

    2. Rapport sur la prévention et la prise en compte de l’exposition des travailleurs aux agents chimiques dangereux remis à la ministre du Travail le 31 août 2018.

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