Risques psychosociaux : faute inexcusable de l’employeur reconnue
La faute inexcusable de l’employeur peut être retenue dès lors qu’il est alerté du mal-être de ses salariés et qu’il ne prend pas les mesures nécessaires pour agir.
Dernière mise à jour le : 25/09/2025
QUE S'EST-IL PASSÉ ?
Arrêt de la Cour de cassation, Civ.2ème, 25 septembre 2025, n°23-14.460
Une salariée se suicide quelques jours après son licenciement. La Caisse primaire d’assurance maladie reconnait le décès de la victime comme un accident du travail et le prend en charge au titre de la législation professionnelle.
Le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité envers la victime avait été reconnue dans un précédent arrêt de la Cour d’appel, notamment en raison de ses pratiques managériales qui avaient créé des conditions de travail très détériorées. Il avait été établi que la salariée n'avait supporté ni ces conditions détériorées, ni les raisons et circonstances de son licenciement, et avait mis fin à ses jours peu de temps après celui-ci.
Les ayants droits de la victime saisissent la juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale afin de voir reconnaître la faute inexcusable de l'employeur.
Cette demande est rejetée par la Cour d’appel. Elle considère que les ayants droits n’apportent pas la preuve que l’employeur avait conscience, ou aurait dû avoir conscience du danger auquel la salariée était exposée.
La Cour de cassation n’est pas de cet avis. Elle casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel.
POURQUOI CETTE DÉCISION ?
Le manquement à l'obligation de sécurité à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
Dans cette affaire, la Cour de cassation considère que l’employeur avait bien conscience du danger auquel était soumis la salariée. Les juges se basent notamment sur les constatations suivantes :
Un courrier du médecin du travail, avant le suicide de la salariée, informant l’employeur du mal-être des salariés de l’entreprise et de l'altération de la santé chez certains d’entre eux. Il avait par ailleurs rappelé à l’employeur ses responsabilités en matière d'évaluation et de prévention des risques psychosociaux.
Un courrier de la salariée victime, envoyé à l’employeur moins de trois mois avant son suicide, dans lequel elle évoquait les difficultés rencontrées dans l'entreprise depuis de nombreux mois, le stress quotidien auquel elle était soumise et dont elle avait subi les conséquences par un arrêt de maladie de trois mois.
Si la Cour d’appel estimait que ces éléments ne permettaient pas à l’employeur de déceler la fragilité psychologique de la salariée, la Cour de cassation retient quant à elle que ce dernier ne pouvait pas ignorer le mal-être de la salariée.
Par conséquent, il ressortait de ces constatations que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience des risques psychosociaux encourue par la salariée. N’ayant pas agi pour préserver la santé et la sécurité de la victime, la faute inexcusable de l’employeur est donc reconnue.
COMMENTAIRE
L’employeur a l’obligation d’assurer la sécurité et de préserver la santé physique et mentale de ses salariés. Les risques psychosociaux doivent être pris en compte dans la démarche de prévention au même titre que les autres risques professionnels. L’employeur doit donc les évaluer et planifier des mesures de prévention adaptées. Afin d’éviter les risques le plus en amont possible, la priorité doit être données aux mesures collectives.
Dès lors que l’employeur est alerté du mal-être d’un ou de plusieurs salariés, il doit agir immédiatement et prendre les mesures nécessaires pour préserver leur sécurité et leur santé.