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Focus prévention

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Sous-traitance dans le BTP et prévention : opportunités et limites

Le recours à la sous-traitance dans le bâtiment et les travaux publics répond à plusieurs logiques économiques, organisationnelles et techniques. Il s’agit d’une pratique très courante notamment en raison de la diversité des compétences requises sur un chantier. Cependant, extérioriser une part de son activité dans un secteur à forte sinistralité n’est pas sans risque, la sous-traitance est alors un défi majeur pour la prévention des risques professionnels. Une organisation, en amont et sur le chantier, bien encadrée est indispensable pour faire de la sous-traitance un levier de sécurité et non un facteur de risque.

Mis à jour le 11/09/2025

Le dispositif REP Bâtiment

Le cadre légal de la sous-traitance dans le BTP

La sous-traitance permet à l’entreprise principale de BTP de réaliser une prestation qu’elle n'est pas en mesure d'accomplir par elle-même en raison, par exemple, d'un manque de temps, de ressources ou de savoir-faire.

Définition de la sous-traitance

La sous-traitance est définie et encadrée par la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975. Il s’agit d’une opération par laquelle un entrepreneur confie à une autre personne, appelée sous-traitant, et sous sa responsabilité, l'exécution de tout ou partie du contrat d'entreprise ou d'une partie du marché public conclu avec le maître d'ouvrage.

Dans le BTP, les tâches sous-traitées, dans un contrat de sous-traitance, sont liées à l’activité de construction. Les entreprises sous-traitantes réalisent et engagent leur responsabilité de constructeur sur une partie de l’ouvrage final.

Selon la définition de la sous-traitance, l’entrepreneur principal, appelé également donneur d’ordre, confie à une autre entreprise tout ou partie de l’exécution des travaux confiés par le maître d’ouvrage. Il est donc responsable, vis-à-vis du maître d’ouvrage, des travaux effectués par le sous-traitant. Il n’y a pas de rapports contractuels directs entre le sous-traitant et le maître d’ouvrage. Par ailleurs, le sous-traitant est l'entrepreneur principal de ses propres sous-traitants.

L’entrepreneur principal qui a recourt à un ou plusieurs sous-traitants doit, au moment de la conclusion du contrat ou du marché et pendant toute sa durée, faire accepter chaque sous-traitant et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance par le maître d’ouvrage.

Le maître d’ouvrage (non assujetti aux règles de la commande publique), en tant que donneur d’ordre, a également la possibilité d’interdire ou de limiter la sous-traitance et d’imposer que tout ou partie du marché soit réalisés directement par l’entrepreneur principal.

Particularité des marchés publics

Dans le cadre des marchés publics, l’article 1er de la loi du 31 décembre 1975 précité précise que le titulaire du marché peut sous-traiter uniquement l’exécution « d'une partie du marché public conclu avec le maître de l'ouvrage ». Par conséquent, en marché public, le recours à la sous-traitance pour la totalité de l’exécution des travaux est interdit. Par ailleurs, le maître d’ouvrage public a la possibilité d’exiger que certaines tâches essentielles du marché soient effectuées directement par le titulaire, et donc d’interdire le recours à la sous-traitance pour l’exécution de ces tâches essentielles (article L2193-3 du Code de la commande publique). Les tâches essentielles concernées doivent alors être indiquées dans l’offre ou les conditions du marché.

Une intervention encadrée

Le donneur d’ordre, qu’il soit maître d’ouvrage ou entrepreneur principal, doit conclure un contrat de sous-traitance pour chaque chantier, avec un descriptif des travaux, un prix forfaitisé et le délai d’exécution​ afin d’assurer une meilleure sécurité juridique.

Faire intervenir un sous-traitant sans devis ni contrat expose le donneur d’ordre à un risque de requalification du contrat par les juges, soit en contrat de travail (considéré comme un employeur, le donneur d’ordre encourt une condamnation pour travail dissimulé ou encore délit de marchandage), soit encore en prêt illicite de main d’œuvre (infraction pouvant entraîner des sanctions pénales et administratives).

Le devoir de vigilance du donneur d’ordre

D’une manière générale, le donneur d’ordre est tenu, vis-à-vis des entreprises sous-traitantes auxquelles il fait appel, d’un devoir de vigilance en matière d’application de la législation du travail.

Il doit ainsi s’assurer que les entreprises avec lesquelles il a conclu un contrat pour exécuter une prestation respectent les interdictions relatives au travail dissimulé, à l'emploi de travailleurs étrangers sans titre de travail ainsi que, le cas échéant, les formalités préalables au détachement de salariés en France.

Le devoir de vigilance du donneur d’ordre concerne également la santé et la sécurité au travail. Dès lors que le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre est informé, par écrit par l’inspection du travail, du non-respect par son sous-traitant (direct ou indirect) de la réglementation applicable à la santé et à la sécurité au travail, il doit aussitôt enjoindre ce dernier par écrit de faire cesser cette situation sans délai (article L8281-1 du Code du travail).

Le principe d’autonomie de l’entreprise sous-traitante

Le contrat de sous-traitance est ce qu’on appelle un contrat d’entreprise, c’est-à-dire un contrat qui oblige à un travail non subordonné, qui ne donne donc pas droit à un salaire mais à une rémunération qui prend la forme d’un prix fixé par avance. Cela implique donc une relation d’indépendance, technique et organisationnelle, de l’entreprise sous-traitante, qui doit avoir son propre matériel et sa propre autonomie, notamment en matière d’encadrement.

Le non-respect par le donneur d’ordre de cette indépendance peut mener à une requalification du contrat de sous-traitance en contrat de travail notamment, et engager la responsabilité civile ou pénale du donneur d’ordre, notamment en cas d’accident du travail.

Pour déterminer si le contrat de sous-traitance doit être ou non requalifié, les juges vérifient notamment les éléments suivants :

  • L’indépendance du sous-traitant dans la direction et l’exécution des travaux ;

  • Son inscription au RCS ou au Répertoire des métiers​ ;

  • L’encadrement des salariés ;

  • L’existence d’une clientèle propre du sous-traitant ;

  • Le savoir-faire et la technicité particulière​ ;

  • Le mode de rémunération des travaux​ ;

  • La fixation de l’emploi du temps​ ;

  • L’affichage du nom du sous-traitant sur le panneau de chantier​ ;

  • La fourniture de matériaux, l’origine de l’outillage​.

Associer les entreprises sous-traitantes à une démarche de prévention

L’implication des sous-traitants dans la démarche de prévention est essentielle à la réussite d’un chantier en toute sécurité. Toutefois, cette implication doit s’effectuer dans un cadre précis, qui respecte l’autonomie des intervenants et évite tout risque d’ingérence. L’équilibre entre coordination et indépendance constitue donc l’élément central d’une politique de prévention efficace sur le chantier.

Obligation de sécurité de l’employeur

Le contrat de sous-traitance n’impliquant aucun lien de subordination avec l’entreprise principale, l’entreprise sous-traitante reste donc l’employeur de ses salariés.

A cet égard, elle reste tenue de son obligation de sécurité à l’égard de ses salariés  : l’employeur a l’obligation d’assurer la sécurité et de préserver la santé physique et mentale de ses salariés. A cet effet, il doit mettre en place des actions visant à prévenir les risques professionnels auxquels ils sont exposés, et mettre en place des actions d’information et de formation à la sécurité, une organisation et des moyens adaptés (comme la mise à disposition d’équipements de protection collective et individuelle).

A titre d’exemple, l’entreprise sous-traitante doit veiller à affecter des salariés à des travaux pour lesquels ils ont les compétences, les formations ou encore les habilitations requises. Ce n’est pas au donneur d’ordre d’assurer ces formations. Cependant, pour éviter certains désagréments tels que des risques de malfaçons, voire une dégradation du respect des règles de sécurité, l’entreprise principale qui veut sous-traiter des travaux devrait vérifier que le sous-traitant a la compétence requise pour exécuter les travaux, et en a les moyens matériels et humains.

De la même façon, l’entreprise principale ne peut pas imposer au sous-traitant ses propres méthodes et outils de travail. Cela relève des prérogatives de l’entreprise sous-traitante. En revanche, elle peut exiger le respect des règles de sécurité communes au chantier : port des équipements de protection, signalisation, accès, circulation, etc. Ces règles relèvent de la coordination du chantier et non d’un lien de subordination.

Sous-traitance et coordination SPS

Une coordination en matière de sécurité et de protection de la santé (SPS) est organisée pour tout chantier de bâtiment ou de génie civil où sont appelés à intervenir plusieurs travailleurs indépendants ou entreprises, entreprises sous-traitantes incluses. La coordination SPS permet de centraliser, auprès du coordonnateur SPS, les échanges entre des différents intervenants sans interférer avec la gestion des équipes.

Le sous-traitant doit participer, préalablement à son intervention, à une inspection commune organisée par le coordonnateur SPS. L'inspection commune sert notamment à préciser les consignes à observer ou à transmettre en fonction des travaux, mais également à analyser les risques en matière de coactivité résultant des travaux réalisés par l'entreprise et à prendre des mesures pour les prévenir.

L’inspection doit avoir lieu avant la remise du plan particulier de sécurité et de protection de la santé (PPSPS) afin que les éléments de l’inspection y soient intégrés et qu’il tienne compte des particularités et des contraintes spécifiques au chantier (environnement, approvisionnement, accès, règles spécifiques…).

En effet, lorsqu’un sous-traitant intervient sur une opération soumise au dispositif de coordination SPS, il doit rédiger un PPSPS (plan particulier de sécurité et de protection de la santé) ou un PPSPS simplifié, en fonction de la durée de l’intervention et de l’existence ou non de risques particuliers.

Le PPSPS est élaboré par chaque entreprise intervenante à partir des informations contenues dans le plan général de coordination SPS, des mesures de prévention prises à la suite de l'évaluation des risques transcrite dans son document unique, et des échanges lors de l'inspection commune réalisée avec le coordonnateur SPS.

Le PPSPS est ainsi à la fois un outil d'organisation opérationnel au service des entreprises et du coordonnateur SPS, et un outil de prévention des risques : il permet à chaque entreprise concernée de préparer son chantier, de former ses travailleurs et de s'adapter aux évolutions du chantier.

Le contrôle de l’entreprise principale

L’entreprise principale et le coordonnateur SPS peuvent intervenir si les règles communes de sécurité du chantier ne sont pas respectées par l’entreprise sous-traitante  : port des équipements de protection individuelle, règles de balisage, règles de circulation …

Le donneur d’ordre doit toutefois respecter l’indépendance du sous-traitant sur le chantier. A titre d’exemple, il ne doit réaliser que périodiquement un contrôle de l’avancement et de la qualité des travaux. Il ne doit ni donner de directives au sous-traitant et aux salariés de ce dernier, sur l’organisation de leur emploi du temps sur le chantier, ni intervenir sur les méthodes de travail propres au sous-traitant. Plus généralement, l'entreprise principale ne peut pas donner d’ordres directs aux salariés du sous-traitant, au risque de créer un lien de subordination déguisé.

Les réunions de chantier sont également l’occasion de favoriser les échanges autour de la prévention de risques professionnels et des questions de sécurité. L’entreprise sous-traitante peut y prendre part pour partager ses observations, ses contraintes ou encore ses propositions tout en gardant son pouvoir de décision sur ses méthodes de travail.