Exercice d’un droit de retrait à effet différé
Lorsqu’un salarié exerce son droit de retrait, les juges doivent rechercher si le salarié avait un motif raisonnable de penser qu'il y avait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé au moment de sa prise de décision.
Dernière mise à jour le : 11/06/2025
Que s’est-il passé ?
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 juin 2025, n°23-23.291
Un salarié a exercé son droit de retrait le 21 décembre 2018 en indiquant qu’il prendra effet au 2 janvier 2019, date de sa reprise de travail après des jours de congé. Il a été licencié un mois plus tard pour faute grave.
Il a saisi la juridiction prud’homale en nullité de son licenciement et en demande de dommages-intérêts pour violation par l'employeur de son obligation de prévention et absence d'organisation de la visite médicale de reprise. L’arrêt rendu par la cour d’appel rejette les demandes du salarié et confirme son licenciement pour faute grave. Il forme alors un pourvoi en cassation.
L’arrêt rendu par la Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel. La Cour de cassation estime que la cour d'appel n'a pas correctement évalué si le salarié avait un motif raisonnable de penser qu'il y avait un danger au moment où il a exercé son droit de retrait. Selon les juges, la cour d’appel aurait dû rechercher si le salarié avait, à la date de l’exercice de son droit de retrait, un motif raisonnable de penser que la situation de travail présentait un danger grave et imminent à la date de sa reprise de poste à l’issue de sa période de congés.
Pourquoi cette décision ?
Le Code du travail prévoit que tout travailleur doit alerter immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d'une telle situation. Et l'employeur ne peut lui demander de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent.
Selon la cour d’appel, le caractère imminent du danger (critère requis pour que l’exercice du droit de retrait soit légitimement exercé) n’était en l’espèce pas caractérisé dans la mesure où le salarié se prévalait d'un droit de retrait « à venir », ne prenant donc effet que de façon différée. L’exerce du droit de retrait n’était donc, selon elle, pas justifié.
Or, pour la Cour de cassation, le fait qu’un salarié exerce un droit de retrait qui débutera à son retour de congés ne rend pas ce droit injustifié dès lors que ce dernier pouvait valablement croire au moment de sa prise de décision que la situation de travail justifiant son droit de retrait présentait un danger grave et imminent à la date à laquelle il devait reprendre son poste.
Commentaire
Le Code du travail prévoit que les travailleurs doivent, en fonction de la formation qu’ils ont reçue et de leurs possibilités, prendre soin de leur santé, veiller à leur sécurité et celles de leurs collègues sur le lieu de travail. Le respect de ces dispositions passe, notamment, par l’exercice du droit de retrait en cas de besoin.
Le salarié peut valablement exercer son droit de retrait lorsqu’il pense avoir un motif raisonnable de croire à une menace sérieuse pour sa santé ou sa sécurité (ou ses collègues), et la situation doit se caractériser par l'urgence à réagir.
L'origine du danger peut se trouver, par exemple, dans un véhicule ou équipement de travail défectueux et non conforme aux normes de sécurité, ou encore en cas d’absence d'équipements de protection collective ou individuelle.