Repérage amiante avant travaux génie civil, infrastructures de transports, réseaux
Un arrêté du 4 juin 2024 définit les modalités du repérage de l’amiante avant certaines opérations dans les ouvrages de génie civil, infrastructures de transport ou réseaux divers. Pour mémoire, le donneur d'ordre, le maître d'ouvrage, ou le propriétaire d'immeubles non bâtis doit faire rechercher la présence d'amiante préalablement à toute opération comportant des risques d'exposition des travailleurs à l'amiante. L’arrêté entrera en vigueur au 1er juillet 2026, à l’exception des annexes relatives à la formation des opérateurs de repérage qui sont, elles, applicables depuis le 1er juillet 2024.
Date du texte : 4 juin 2024
L'arrêté du 4 juin 2024 vient en application de l’article R4412-97 du Code du travail, qui prévoit les conditions dans lesquelles la mission de repérage est conduite avant certaines opérations réalisées dans les immeubles autres que bâtis, définies par arrêté. Cela vise les immeubles tels que les ouvrages de génie civil, infrastructures de transport ou réseaux divers.
Le donneur d'ordre, le maître d'ouvrage ou le propriétaire d'immeubles non bâtis qui décide d'une opération comportant des risques d'exposition des travailleurs à l'amiante doit préalablement faire rechercher la présence d'amiante. Le donneur d’ordre est défini comme la personne physique ou morale qui définit et commande les travaux dans un ouvrage de génie civil, une infrastructure de transport ou un réseau divers.
Le RAT sur ces ouvrages a pour objectif de rechercher, identifier et localiser les matériaux et produits contenant de l’amiante susceptibles d'être affectés par les travaux en sous-section 3 et interventions en sous-section 4.
La recherche d’amiante est assurée par un opérateur de repérage, et réalisée conformément aux exigences de la norme NF X 46-102 : novembre 2020 - « Repérage des matériaux et produits contenant de l'amiante dans les ouvrages de génie civil, infrastructures de transport et réseaux divers - Mission et méthodologie » (norme consultable gratuitement sur le site de l’Afnor). Le RAT est nécessairement adapté à la nature et au périmètre de l’opération projetée par le donneur d’ordre.
À noter, lorsque l’opération projetée relève de plusieurs domaines d’activité au sens de l’article R4412-97.II du Code du travail (par exemple une opération concernant des immeubles non-bâtis et des immeubles bâtis), le donneur d’ordre a la possibilité de désigner un coordinateur de second niveau parmi les opérateurs de repérage choisis pour chacun des domaines concernés.
L’arrêté précise également les conditions attendues pour la bonne réalisation du RAT lorsque certaines investigations techniques sont indissociables de l’engagement des travaux projetés (repérage au fur et à mesure de l’avancement des travaux), conformément à l’article R4412-97-4 du Code du travail. Dans ce cas, le donneur d’ordre doit faire appel, pour les travaux nécessitant des investigations complémentaires, à des entreprises ayant les compétences requises pour réaliser en sécurité ces travaux susceptibles d’exposer les travailleurs aux fibres d’amiante. Ces entreprises devront ainsi mettre en œuvre les mesures de prévention collectives et individuelles comme si la présence de l’amiante était avérée, et ce conformément aux dispositions de l’article 12 de l’arrêté.
Dispense de réaliser un RAT
Le donneur d’ordre est dispensé de procéder à une recherche d’amiante lorsque les informations provenant des documents de traçabilité (et de leurs mises à jour à la suite d’éventuelles opérations de repérage antérieures) permettent d’ores et déjà de conclure à l’absence ou à la présence d’amiante dans les matériaux et produits susceptibles d’être concernés par les travaux projetés. Ces documents doivent ainsi lui permettre d’évaluer correctement le risque d'exposition des travailleurs à l'amiante lors de l’opération.
Le donneur d’ordre doit alors préciser dans le dossier de consultation des entreprises, ou lors de la passation de la commande de travaux, le ou les documents sur lesquels il fonde cette dispense totale ou partielle de procéder à une recherche préalable d’amiante sur un ouvrage donné concerné par l’opération programmée.
Exemptions de l’obligation de RAT
Pour mémoire, l'article R.4412-97-3 précise les situations ou conditions dans lesquelles il peut être constaté l'impossibilité de réaliser un RAT :
Exemption découlant de situations d'urgence (nécessairement en lien avec un sinistre) ;
Exemption découlant du besoin de protection de l’opérateur de repérage (dans le cas où la réalisation du RAT emporterait un risque excessif pour sa sécurité ou sa santé) ;
Exemption pour les opérations remplissant les conditions cumulatives suivantes :
- Visant à réparer ou à assurer une maintenance corrective ;
- Constitutive d’une intervention en sous-section 4 ;
- Mettant en œuvre un ou des processus relevant du premier niveau d’empoussièrement de l’article R4412-98 du Code du travail (inférieur à 10 fibres par litre).
Lorsque, pour ces motifs, le RAT ne peut être réalisé, la protection collective et individuelle des travailleurs doit être assurée comme si la présence de l'amiante était avérée. Pour cela, les entreprises intervenantes doivent déterminer, en fonction du programme de travaux fixé par le donneur d’ordre, les processus que leurs travailleurs sont susceptibles de mettre en œuvre ainsi que le niveau d’empoussièrement associé.
Concernant les deux premiers cas d’exemptions, l’entreprise intervenante doit mettre en œuvre les mesures de protection collective et individuelle associées aux processus utilisés de façon à éviter la dispersion éventuelle des fibres à l’extérieur de la zone de travail et à assurer efficacement la protection de ses travailleurs. Chaque entreprise doit par ailleurs tracer dans son document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) les moyens de protection collective dont, le cas échéant, les types de protection des surfaces et de confinement de la zone de travail mis en place pour chaque processus.
Le donneur d’ordre conserve la possibilité de missionner un opérateur de repérage en cours de travaux afin de lever le doute sur la présence ou l’absence d’amiante sur la partie du périmètre de l’opération concernée par un cas d’exemption. Selon les conclusions de ce repérage, les mesures de prévention devront être adaptées pour la suite des travaux à réaliser.
Enfin, pour le troisième cas d’exemption, l’arrêté impose aux entreprises intervenantes de justifier, pour les différents processus qu’elles sont appelées à mettre en œuvre dans ce contexte, d’un ou de plusieurs mesurages réalisés conformément aux exigences des articles R4412-103 à R4412-106 du Code du travail (mesurages servant à l’évaluation du niveau d’empoussièrement des processus) et mettant en évidence un empoussièrement relevant du premier niveau (de 0 à 99 fibres d’amiante par litre). À défaut, les entreprises doivent s’appuyer sur les données d’une source fiable (telle que CARTO AMIANTE) faisant état d’un tel résultat.
Les compétences requises d’un opérateur pour mener une mission de repérage amiante sont précisées à l’article 5 et aux annexes I et II de l’arrêté.
Les opérateurs de repérage de l’amiante doivent détenir les compétences suivantes (annexe II) :
Être titulaire de la certification avec mention et disposer d’un niveau de compétence dans le domaine des techniques de bâtiment a minima de niveau 4 du cadre national des certifications professionnelles (diplômes du niveau baccalauréat ou équivalent)ou justifier d’une expérience d’au moins 3 ans sur un poste technique relevant du domaine des ouvrages de génie civil, des infrastructures de transport ou des réseaux divers ;
Suivre et valider un tutorat supervisé par un opérateur expérimenté ;
Avant d’effectuer toute mission de recherche de l’amiante, détenir l’attestation de compétence pour les interventions en sous-section 4 (arrêté du 23 février 2012 définissant les modalités de la formation des travailleurs à la prévention des risques liés à l’amiante) ;
Détenir les compétences lui permettant de procéder à l'estimation de la quantité de matériaux et produits contenant de l'amiante de manière à permettre au donneur d'ordre d'évaluer les quantités prévisibles de déchets amiantés et les filières d'élimination adaptées ;
En fonction de la catégorie d’ouvrage qu’ils envisagent d’investiguer (ouvrages de génie civil, infrastructures de transport ou réseaux divers), détenir les compétences dispensées et vérifiées au travers de formations théoriques et pratiques par un organisme de formation (tronc commun et module spécifique) tel que précisé à l’annexe I.
En effet, les opérateurs en charge du RAT portant sur une ou plusieurs catégories d’ouvrage concernées par l’arrêté doivent acquérir, pour chaque ouvrage concerné par la mission de repérage, les compétences réglementairement requises en ayant suivi et validé la formation certifiante prévue en annexe I de l’arrêté auprès d’un organisme de formation. Cette formation certifiante est constituée d’un tronc commun pour toutes les catégories d’ouvrage et doit ensuite être complétée par un ou plusieurs modules spécifiques (un pour chacune des catégories d’ouvrage).
À noter, en cas d'opération concernant plusieurs sous-domaines (ouvrages de génie civil et/ou infrastructures de transport et/ou réseaux divers), le donneur d'ordre doit missionner, pour chaque sous-domaine, un opérateur de repérage ayant suivi le module de formation spécifique le concernant. Dans ce cas de figure, il a la possibilité de désigner parmi les différents opérateurs de repérage, un coordinateur dit « de premier niveau » en charge d’assurer une coordination efficace entre les différents opérateurs missionnés.
À noter, contrairement au reste de l’arrêté qui entre en vigueur au 1er juillet 2026, les deux annexes de l’arrêté relatives à la formation des opérateurs sont applicables depuis le 1er juillet 2024.
Les modalités de préparation et de réalisation des missions de RAT ainsi que les critères sur lesquels peut s’appuyer l’opérateur de repérage pour fonder des conclusions de présence ou d’absence d’amiante sont précisées à l’article 6 de l’arrêté.
L’opérateur de repérage prépare et conduit la mission de repérage de l'amiante conformément aux exigences du paragraphe 4 de la norme NF X 46-102 : novembre 2020.
Selon que l'opération projetée porte sur un ou plusieurs ouvrages de génie civil et/ou infrastructures de transport et/ou réseaux divers, la recherche d'amiante porte a minima sur les matériaux et produits listés aux annexes A, B et/ou C de la norme NF X 46-102 : novembre 2020. Cette liste est complétée par tout autre matériau ou produit susceptible de contenir de l’amiante que l’opérateur de repérage identifierait au cours de sa mission.
La recherche d’amiante menée par l’opérateur de repérage doit donc prendre en compte les données issues de ces listes, en fonction du programme de travaux, et en prenant en considération les éventuels documents techniques s’y rapportant.
L’arrêté prévoit également des dispositions spécifiques en cas de recours à un prestataire spécialisé pour les prélèvements à des fins de sondages (article 6.III), ou à un géologue pour les investigations portant sur les ballasts d’une voie ferrée ou les pierres ornementales d’une infrastructure de transport ou d’un ouvrage de génie civil (article 6.IV).
L’opérateur de repérage ne peut conclure à la présence ou à l’absence d’amiante sur la base de son seul jugement personnel. Par conséquent, si l’opérateur de repérage ne dispose d’aucun élément fiable (via le document de traçabilité, un précédent repérage de l’amiante sur le même périmètre que l’opération nouvellement projetée, un marquage, des documents techniques ou des données géologiques dans le cas de ballasts, granulats ou pierres ornementales), ou en cas de doute sur la qualité des informations dont il dispose, il doit alors effectuer un ou plusieurs prélèvements d’échantillon sur les matériaux ou produits relevant du programme de repérage en vue de leur analyse par un laboratoire accrédité. Pour cela, l’opérateur de repérage doit établir une stratégie d’échantillonnage en s’appuyant sur les données fournies par la norme NF X 46-102 : novembre 2020 en fonction de la catégorie d’ouvrage investiguée.
Enfin, l’arrêté précise que les méthodes d’analyse des échantillons prélevés sont celles définies par l’arrêté du 1er octobre 2019 relatif aux modalités de réalisation des analyses de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante, aux conditions de compétence du personnel et d’accréditation des organismes procédant à ces analyses. Il définit par ailleurs les modalités du marché de repérage définies par le donneur d’ordre pour le choix du laboratoire accrédité en charge des analyses.
Le donneur d’ordre doit respecter les dispositions des paragraphes 4.3.1 et 4.3.2 de la norme NF X 46-102 : novembre 2020, qui précisent les exigences relatives à la passation de la commande du repérage (communication du programme détaillé des travaux ainsi que de toutes informations utiles à la préparation comme à la réalisation de cette mission) et à son organisation (désignation d’un accompagnateur, fourniture de moyens d’accès, précision des modalités de circulation en sécurité sur l’ouvrage à investiguer, etc.).
Par ailleurs, le donneur d’ordre doit respecter l’indépendance et l’impartialité de l’opérateur de repérage, notamment lorsque ce dernier est son salarié.
D’un point de vue organisationnel, le donneur d’ordre doit :
Procéder, préalablement à l’engagement de la mission de repérage, à l’enlèvement ou au déplacement du mobilier présent dans les parties de l’ouvrage de génie civil, de l’infrastructure de transport ou des réseaux divers concernées. L’ensemble des composants relevant du périmètre de l’opération projetée doit être accessible. Tout risque de pollution du mobilier par des fibres d’amiante que pourraient occasionner les investigations de l’opérateur doit être écarté ;
Procéder à l’évacuation des personnels de l’ouvrage de génie civil, de l’infrastructure de transport ou des réseaux divers avant réalisation des recherches de nature à générer une émission de fibres d’amiante.
Une fois sa mission achevée, l’opérateur de repérage établit un rapport par ouvrage investigué (y compris lorsque la mission porte sur plusieurs ouvrages relevant d’un même sous-domaine), rédigé en français, selon les modalités précisées à l’article 8 de l’arrêté (et selon l’annexe F de la norme NF X 46-102 : novembre 2020).
Lorsque le repérage est réalisé au fur et à mesure de l’avancement des travaux, l’opérateur de repérage remet un rapport explicitant les raisons techniques pour lesquelles il n’a pu mener sa mission sur des parties de l’ouvrage restées inaccessibles, ainsi que les investigations complémentaires que le donneur d’ordre devra engager lorsqu’elles seront rendues techniquement possibles.
Par ailleurs, dans le cas où la mission de repérage n’a pu être menée à son terme du fait du donneur d’ordre qui n’a pas pris les mesures d’organisation appropriées pour ce faire, l’opérateur de repérage établit, après l’avoir alerté en vain et par écrit de cette situation, un pré-rapport portant uniquement sur les parties qui lui ont été accessibles, avec les moyens qui lui ont effectivement été mis à disposition par le donneur d’ordre.
Le donneur d'ordre doit conserver le rapport ou le pré-rapport restituant les conditions de réalisation et les conclusions de cette recherche d'amiante et mettre à jour le dossier de traçabilité avec les données issues du repérage. Il communique ce rapport sur demande des agents de contrôle de l’inspection du travail et des CARSAT.
Si le donneur d'ordre n'est pas propriétaire de l'ouvrage de génie civil, de l'infrastructure de transport ou du réseau divers concerné par la mission de repérage, il est tenu d’adresser au propriétaire une copie du rapport de repérage afin que ce dernier puisse mettre à jour le dossier de traçabilité.
L’article 13 fixe les conditions d’opposabilité des repérages réalisés avant la date d’entrée en vigueur du présent arrêté fixée au 1er juillet 2026, en distinguant deux situations :
les repérages réalisés avant le 1er juillet 2026 conformément à la norme NF X 46-102 : novembre 2020 sont considérés comme des RAT conformes à l’article R4412-97 du Code du travail, ils sont donc exploitables et opposables ;
les repérages réalisés avant le 1er juillet 2026 qui ne respectent pas les exigences de la norme NF X 46-102 : novembre 2020 doivent, en cas de programmation de nouveaux travaux, être évalués et, le cas échéant, complétés par un opérateur de repérage répondant aux exigences de compétence fixées l’article 5 et selon les modalités de la norme précitée.