Faute inexcusable de l’employeur dans le BTP

    ©OPPBTP

    L'obligation de sécurité de résultat de l’employeur

    L’obligation de sécurité de l’employeur implique qu'il doit prendre les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés, en se fondant sur les 9 principes généraux de prévention (articles L4121-1 et L4121-2 du Code du travail). Ces mesures doivent être inscrites dans le document unique d’évaluation des risques et dans le plan d’action qui l’accompagne.

    L’évolution de la jurisprudence a conduit les juges ces dernières années à davantage tenir compte des mesures de prévention mises en place par l’employeur pour apprécier le respect de son obligation de sécurité. Pour que cette obligation soit considérée comme remplie, ce dernier doit prouver qu’il a mis en œuvre toutes les mesures nécessaires pour préserver la santé et la sécurité des salariés (Arrêt « Air France », Cass. soc. 25 novembre 2015, n° 14-24444). C’est ce que l’on appelle généralement l’obligation de sécurité de moyens renforcés.

    Tout manquement de l’employeur à l’obligation de prévention des risques professionnels (se traduisant en pratique par la survenance d’un accident du travail ou par l’apparition d’une maladie professionnelle) est susceptible d'engager sa faute inexcusable s'il est démontré qu’il avait connaissance des risques et qu’il n’a pris aucune mesure pour les éviter. En revanche, la faute inexcusable de l’employeur n’a pas été retenue par la Cour de cassation lorsque, par exemple :

    • les circonstances de l’accident demeurent inconnues ou sont imprécises ;
    • les lésions sont incompatibles avec les circonstances de l’accident ;
    • l’identification des risques liés aux équipements de travail avait été réalisée et les règles de sécurité en vigueur avaient été respectées ;
    • l’intérimaire avait bénéficié d’une formation renforcée à la sécurité.

    Lorsque cette faute est effectivement reconnue, cela entraîne des conséquences financières pour le chef d’entreprise, qui sera alors tenu, sur son patrimoine, de rembourser aux organismes sociaux les indemnités versées aux victimes et de leur verser des indemnités complémentaires. Si l’employeur est assuré en matière de faute inexcusable, la CPAM pourra recouvrir ces sommes directement auprès de l’assureur.

    Qui apporte la preuve de la faute inexcusable ?

    C’est à la victime ou à ses ayants droit d’apporter la preuve du lien entre le dommage subi et le manquement de l’employeur à ses obligations en matière de prévention.

    La faute inexcusable peut également être acquise de droit (1) ou présumée acquise (2) :

    1. lorsque la victime de l’accident ou un représentant du CSE avait préalablement signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé (article L4131-4 du Code du travail) ;
    2. lorsque la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est un travailleur intérimaire, ou titulaire d’un CDD, ou un stagiaire affecté à un poste de travail présentant des risques particuliers sans avoir bénéficié au préalable d’une formation renforcée à la sécurité (article L4154-3 du Code du travail).

    Lorsque la faute inexcusable de l’employeur est reconnue, la victime obtient une indemnisation complémentaire (majoration de rente ou de capital, dommages et intérêts), outre les prestations auxquelles elle avait déjà droit en application du Code de la sécurité sociale.

    À noter

    La jurisprudence a progressivement élargi le champ d’indemnisation de la faute inexcusable à d’autres préjudices que ceux prévus par le Code de la sécurité sociale, comme par exemple les frais d’aménagement du logement et de l’adaptation du véhicule, les risques psychosociaux consécutifs à un accident ou une maladie, le préjudice sexuel ou le recours à une tierce personne. La Cour de cassation a également récemment admis que les victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles consolidés puissent percevoir, en complément de leur rente, une indemnité distincte, correspondant aux souffrances physiques et morales (ce que l’on appelle le déficit fonctionnel permanent). (Cass. Pl, 20 janvier 2023 – n°21-23947 et n°20-23673). 

    Quelle est la procédure à suivre ?

    Le salarié souhaitant faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur adresse une demande à la caisse de sécurité sociale (CPAM) qui a reconnu le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie, et dispose pour cela d’un délai de deux ans.

    La caisse propose tout d’abord une conciliation entre l’employeur et son salarié. En cas d’échec, le salarié doit saisir le pôle social du Tribunal judiciaire de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable.

    Afin de voir écartée sa faute inexcusable, l’employeur doit apporter la preuve qu’il ne pouvait pas avoir conscience du risque, ou qu’il a pris toutes les mesures nécessaires pour préserver la santé et la sécurité des salariés.

    Compte tenu des enjeux financiers et des risques encourus, il est conseillé à l’employeur de souscrire une assurance faute inexcusable. Facultative, cette garantie optionnelle est souvent intégrée au contrat d’assurance responsabilité civile générale de l’entreprise. Son étendue, son coût et les modalités de couverture de la garantie varient d’un assureur à l’autre.

    À noter

    Les assurances couvrent généralement l'assistance juridique et la défense devant les juridictions pénales et judiciaires, la majoration des rentes, le paiement des préjudices personnels. En revanche, les sanctions pénales ne peuvent pas être couvertes par une assurance.

    En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies. Ceux-ci nous permettent de connaitre votre profil preventeur et d’ainsi vous proposer du contenu personnalisé à vos activités, votre métier et votre entreprise. En savoir plus